Les mouvements pendulaires de recentralisation de l’économie cubaine : Notes pour un débat (1960-2018)

El péndulo de la recentralización de la economía cubana: notas para un debate (1960 -2018)

Résumé
À partir de 2016, les autorités cubaines sont revenues sur certaines mesures d’ouverture au marché et au secteur privé, en contradiction avec le processus d’actualisation économique en cours depuis près d’une décennie. Depuis la Révolution de 1959, la politique économique du gouvernement cubain alterne entre phases de décentralisation et de centralisation. La plupart des analyses portant sur l’enclenchement des phases de centralisation explique ces mouvements par des justifications politiques et/ou idéologiques. À contre-courant de ces études, nous montrons dans ce papier que les raisons fondamentales de ces soubresauts sont dues à des chocs économiques exogènes négatifs conduisant les autorités cubaines à centraliser l’allocation des ressources et à contraindre la sphère marchande afin de juguler l’inflation et de gérer la pénurie de biens fondamentaux.

Mots clés : Cuba ; Centralisation ; Chocs exogènes ; Politiques économiques.

Resumen
A partir de 2016, las autoridades cubanas han revertido algunas de las medidas de apertura del mercado y del sector privado, en contradicción con el proceso de actualización económica que se viene realizando desde hace casi una década. Desde la Revolución de 1959, la política económica del gobierno cubano ha alternado entre las fases de descentralización y centralización. La mayoría de los análisis sobre el inicio de las fases de centralización explica estos movimientos por justificaciones políticas y/o ideológicas. Contrariamente a estos estudios, en este documento mostramos que las razones fundamentales de estos trastornos se deben a choques económicos negativos que llevan a las autoridades cubanas a centralizar la asignación de recursos y a limitar la esfera del mercado para frenar la inflación y gestionar la escasez de bienes básicos.

Palabras claves: Cuba; Centralización; Choques exógenos; Políticas económicas.

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Jérôme Leleu

Master 2 Economie
Institut des Hautes Etudes de l'Amérique latine / Université de Paris 3-Sorbonne Nouvelle

 Reçu le 11 octobre 2020/Accepté le 12 juillet 2021

Les mouvements pendulaires de recentralisation de l'économie cubaine : notes pour un débat (1960-2018)

Introduction

         À l’été 2017, les autorités cubaines décidaient de suspendre l’octroi de licences pour un certain nombre d’activités privées (Puig Meneses, 2017), bien que, depuis le remplacement de Fidel Castro par Raúl Castro à la tête de l’État cubain en 2008, des mesures économiques renforçant la régulation par le marché aient été mises en place progressivement. Mais aucune réforme d’envergure dans ce domaine n’avait été prise dans ce sens depuis 2014. Avons-nous assisté au déclenchement d’un nouveau cycle de centralisation des décisions économiques ?

L’histoire de la politique économique cubaine depuis la Révolution de 1959 est ponctuée d’alternances entre : 1) des politiques de décentralisation caractérisées par une autorisation plus ou moins large de l’entreprenariat privé ainsi que des investissements directs étrangers (IDE) et par l’accroissement de l’autonomie de décision des entreprises d’État ; 2) des politiques de (re)centralisation limitant ou supprimant la place du marché et de l’entreprise privée et réduisant l’autonomie de décision des unités économiques étatiques.

Ces différentes phases ont été largement étudiées au sein de la sphère académique, que ce soit dans le pays même avec José Luis Rodriguez (1990), aux États-Unis par Carmelo Mesa Lago (1990, 1991, 1994, 2013) ou Jorge Perez Lopez (2013), en Europe par Janette Habel (1989) et dans d’autres pays américains notamment par Sovilla et García Fernández (2013). Ces travaux montrent généralement que les périodes de décentralisation succèdent aux périodes de centralisation en raison de leurs mauvais résultats économiques. D’un autre côté, les phases de centralisation succèdent aux phases de décentralisation en raison, selon ces mêmes travaux, d’objectifs de conservation du pouvoir politique par la classe dirigeante, de justifications idéologiques et/ou d’évènements économiques conjoncturels.

Notre étude reprend le raisonnement de Susan Eckstein (1990, 1994) concernant l’enclenchement de la phase de centralisation nommée « Processus de rectification des erreurs et tendances négatives » qui débuta en 1986 et que nous élargirons à deux autres périodes de centralisation, l’« offensive révolutionnaire » (1965-1070) et la « bataille des idées » (2003-2007) . Pour cet auteur, c’est le renforcement de la contrainte économique extérieure qui a conduit les autorités cubaines à restreindre le secteur privé et à recentraliser la gestion et l’allocation des ressources.

En analysant l’environnement extérieur de Cuba en amont et au moment de ces revirements, en prenant en compte les relations avec ses principaux partenaires commerciaux et/ou les prix des principaux produits exportés ou importés, nous montrerons que l’application de mesures centralisatrices est liée aux chocs exogènes dégradant l’activité économique. Et que les réactions des autorités cubaines répondent à des objectifs bien précis : empêcher l’inflation légale en restreignant le marché et le secteur privé et en renforçant le contrôle de la gestion et de l’allocation des ressources dans un contexte générant ou aggravant la pénurie des biens de production et de consommation.

Nous commencerons dans cet article par faire un inventaire des principales études portant sur les différentes phases de la politique économique cubaine. Nous nous centrerons en particulier sur les analyses de Carmelo Mesa Lago, qui les a largement systématisées. Puis nous montrerons que les phases de centralisation surviennent toutes en réponse à des chocs économiques exogènes négatifs. Elles tentent de contrecarrer de manière administrative les effets inflationnistes potentiels. Les autorités cubaines cherchent à gérer l’allocation des ressources dans des contextes d’aggravation de la pénurie. À cette fin, nous décrirons les mesures économiques prises durant les phases de centralisation puis nous mettrons en avant la situation des relations de Cuba avec ses principaux partenaires étrangers ainsi que les effets économiques du choc externe. Enfin, nous nous interrogerons sur l’existence d’une nouvelle phase de centralisation entre 2016 et 2018.

I. La centralisation : une phase politique et idéologique ?
           A. Centraliser pour conserver le contrôle politique

          L’histoire de la politique économique cubaine depuis la Révolution de 1959 est caractérisée par l’enchaînement de périodes, les unes promouvant une décentralisation de la prise de décision économique et l’ouverture au marché, les autres renforçant la centralisation et limitant la place du marché. Elles durent entre quatre et quatorze années. Chacune est particulière et les mesures de décentralisation ou de centralisation peuvent être plus ou moins accentuées selon les phases.
La plupart des études qui analysent ces alternances entre politiques de centralisation et de décentralisation les interprètent comme une valse d’hésitation entre déterminants économiques, qui justifient l’ouverture de l’économie, et déterminants politiques, qui engendrent la reprise en main de l’économie par les institutions centralisées de l’État.
L’analyse de ces phases présentée par Carmelo Mesa Lago dans plusieurs de ses travaux (1990, 1991, 1994, 2013), et notamment les raisons invoquées pour la mise en place de politiques économiques centralisatrices, ne nous paraissent pas suffisantes. Cet auteur distingue les cycles pragmatiques (décentralisation) et idéalistes (centralisation) et chaque changement de cycle est interprété comme une volonté de contrôle politique de la part des autorités politiques cubaines.
Les phases de décentralisation conduisent généralement à de meilleurs résultats économiques et à une amélioration du niveau de vie moyen de la population, mais elles génèrent des effets sociaux adverses, tels que la montée des inégalités, du chômage…Pour Mesa Lago, par crainte d’instabilité sociale, le régime met en place des mesures de centralisation afin de conserver le contrôle politique. En outre, les phases de centralisation entraînent un affaiblissement des performances économiques et sociales et génèrent des crises. Les autorités cubaines seraient donc contraintes d’adopter des mesures de décentralisation afin d’améliorer la situation économique et de préserver le régime et le contrôle politique.
« Typiquement, une fois que la direction politique a estimé que le régime avait été suffisamment renforcé par des politiques pragmatiques, elle a lancé un nouveau cycle idéaliste, perpétuant ainsi l’alternance des politiques. »[1] [2](Mesa Lago, 2013 : 4). L’autre aspect présenté comme primordial par Mesa Lago pour l’enclenchement de cycles « idéalistes » est la perte de contrôle économique que génèrent les politiques de décentralisation. En effet, durant ces phases, des agents (directeurs d’entreprises, travailleurs indépendants…) disposent de pouvoirs économiques qui peuvent aller en s’accroissant et menacer le pouvoir de la couche dirigeante.
« Ainsi, nous soutenons que la logique politique (la conservation du régime et du contrôle) a prévalu sur la logique économique, provoquant la reproduction de cycles idéalistes. De plus, les augmentations du chômage et des inégalités et d'autres effets négatifs associés au marché ont semblé inacceptables pour la direction politique (…) »[3] (Mesa Lago, 2013: 4)
Par exemple, concernant l’enclenchement du « Processus de rectification des erreurs et tendances négatives » en 1986, Mesa-Lago stipule qu’une application complète du Système de direction et de planification de l’économie (SDPE)[4] aurait réduit les pouvoirs de l’État et du Parti communiste, ce qui explique dans une certaine mesure ce processus de recentralisation des décisions (Mesa Lago, 1990).
La phase de centralisation qui débute en 2003 et nommée « La bataille des idées » est également vue par Mesa Lago comme la conséquence d’une peur de perte de pouvoir des leaders politiques devant la montée en puissance et en nombre des managers disposant d’autonomie ou des entrepreneurs privés (Mesa Lago, 2013).

    B. Pas de recentralisation sans Fidel Castro ?

Comme Mesa Lago, d’autres auteurs mobilisent le même type d’analyse pour expliquer la mise en place des phases de centralisation. C’est le cas notamment de Bruno Sovilla et de Francisco García Fernández (2013). Pour ces auteurs, les mesures de recentralisation seraient dues à la volonté personnelle de Fidel Castro, notamment lors du « Processus de rectification des erreurs et tendances négatives ».
Le fait que Fidel Castro ne soit plus au pouvoir depuis 2008, et décédé depuis fin novembre 2016, empêche le retour à un cycle centralisateur. Fidel Castro est pour ces auteurs la clé principale pour expliquer les résurgences des phases de centralisation.
Pour Mesa Lago également, l’idéologie et les décisions de Fidel Castro sont le principal facteur du déclenchement des différents cycles, par son inclination vers la centralisation, la « collectivisation » des moyens de production, l’égalitarisme, la mobilisation par le travail… Néanmoins, il met tout de même en évidence, dans une moindre mesure, des facteurs externes, comme l’attitude de l’administration des États-Unis. Lorsque celle-ci est très hostile, les cycles de centralisation persistent.
Face à ces explications faisant la part belle aux facteurs politiques et idéologiques, d’autres auteurs mettent en avant des mécanismes économiques comme justifications des phases de centralisation. Le facteur politique ne serait pas le facteur primordial ou unique. Concernant le « Processus de rectification des erreurs et tendances négatives » initié en 1986, Susan Eckstein (1990) ou Andrew Zimbalist (1989) mettent en évidence le fait que ce sont des déséquilibres en termes de commerce et de relations extérieurs qui ont conduit les autorités cubaines à prendre des mesures de centralisation. En effet, l’augmentation de la dette en monnaie librement convertible (MLC) entraîna une diminution importante des importations et une contraction de l’économie. Devant les menaces de pénuries et d’inflation sur les marchés « libres », les autorités cubaines, afin d’empêcher l’inflation légale et de contrôler l’allocation des ressources potentiellement plus rares, avaient décidé d’appliquer des mesures de recentralisation.
En regardant de plus près les deux autres phases de centralisation, il apparaît que chacune est précédée de chocs exogènes négatifs, liés principalement à des difficultés en termes de commerce et de relations extérieurs.

II. Les phases de centralisation et leurs causes économiques
        
         Dans cette section, nous avançons que les politiques économiques de centralisation constituent une réponse des autorités cubaines à des facteurs économiques externes, en l’occurrence des chocs exogènes négatifs dégradant les termes de l’échange et entraînant une baisse de la production ou aggravant des situations de pénurie.

    A. L’offensive révolutionnaire (1965-1970)

         Nous pouvons dater le commencement de la période dite de « l’offensive révolutionnaire » en 1965. Au cours des années 1965 et 1966, l’appareil administratif et économique est réorganisé. Ainsi, l’influence de l’organe central de planification (Junta central de planificación, JUCEPLAN) diminue fortement, l’élaboration des plans revient en grande partie aux plus hautes autorités de l’État (Larifla, 1995).
Cette phase est caractérisée par la suppression des stimulants matériels (primes…), des normes de travail et du budget de l’État (Mesa Lago, 2013) ainsi que par une vaste campagne de mobilisation des travailleurs à travers l’amplification du travail volontaire.
La mesure emblématique de cette période est la nationalisation de plus de 50 000 petits commerces en mars 1968. Le secteur privé a quasiment disparu à cette date[5]. Seule une portion minoritaire du secteur agricole est gérée par des agriculteurs privés. Mais presque l’ensemble de la production doit être vendu à l’État. Les marchés libres ainsi que les lopins familiaux des fermes d’État ont été supprimés.
La réduction très importante du secteur privé durant cette période n’est pas intervenue seulement pour des raisons politiques et idéologiques – une transition rapide vers le communisme – et peut s’expliquer aussi, et principalement, par des difficultés en termes de commerce extérieur. Ce dernier est complètement réorganisé après la Révolution et il n’est pas encore tout à fait stabilisé. Les effets de l’embargo étatsunien, institué en 1962, sont négatifs pour l’économie cubaine et ont une incidence sur le développement de pénuries[6]. Des effets qui se sont aggravés par la pression exercée par les États-Unis sur leurs alliés pour limiter le commerce avec Cuba[7].
La productivité du travail diminue de près de 27% dans l’industrie et de 14% dans l’agriculture entre 1962 et 1966 (Bettelheim, 1987). Le PIB n’augmente que de 3,1% entre 1965 et 1970 tandis que le PIB par habitant diminue de 5,9% (Eckstein, 1994).
En parallèle, Cuba développe des relations économiques et de coopération technique avec les pays d’Europe de l’Est et l’URSS, et dans une moindre mesure, avec la Chine. Mais celles-ci ne sont pas encore totalement assurées et certains conflits latents peuvent les remettre en cause. Ainsi, peu avant les nationalisations de 1968, un différend émerge entre Cuba et la Chine concernant les livraisons de riz de cette dernière que Cuba voudrait voir augmenter, ce que la Chine refuse. Mais le fait le plus notable est la suspension des livraisons de pétrole par l’Union Soviétique en janvier 1968[8].
En raison des effets - réels ou potentiels - hautement négatifs sur l’économie de ce dernier évènement et du contexte extérieur général, la réponse des autorités cubaines, optant pour une quasi disparation du secteur privé et de la monnaie, a été fait dans le souci d’empêcher le développement d’une inflation légale dans le secteur privé – les prix étant fixés administrativement par ailleurs – et de renforcer la centralisation de la gestion et de l’allocation des ressources dans un contexte d’aggravation des pénuries.
Il est aussi important de noter que depuis le début de la Révolution jusqu’à cette période, les liquidités monétaires détenues par la population s’étaient fortement accrues en raison des augmentations de salaire, des baisses de prix et d’une insuffisance de l’offre de biens de consommation. Ce facteur économique interne est à prendre en compte pour expliquer la quasi-suppression du marché et des activités privées. En effet, le potentiel inflationniste de cet excédent monétaire ne pouvait être ignoré.
« La montée de l’inflation et l’incapacité dans laquelle sont les dirigeants cubains de la contrôler les rallient à l’idée qu’ils ne sortiront des difficultés économiques qu’en « abolissant » le plus tôt possible la monnaie. On retrouve là une réaction observée en URSS au début des années 1930. » (Bettelheim, 1987: 250)

    B. Le « processus de rectification des erreurs et tendances négatives » (1985-1990)

La deuxième période de centralisation, le « Processus de rectification des erreurs et tendances négatives », débute en 1986. Il est annoncé peu avant le 3ème congrès du Parti communiste cubain (PCC). Le SDPE est abandonné, et donc la relative autonomie des entreprises. Certaines personnalités au sein de la JUCEPLAN - dont son président Humberto Pérez - ou de la commission d’implantation du SDPE, sont destituées. À l’instar des années 1960, s’instaure à nouveau une certaine concurrence entre le pouvoir politique et l’organe majeur de la planification.
Une recentralisation des prises de décisions économiques est relancée. Dès 1984, la JUCEPLAN perd son pouvoir exécutif sur l’élaboration du plan, remis au groupe central étatique (GEC) dirigé par des membres du Conseil exécutif du Conseil des ministres (CECM) présidé par Fidel Castro. Le GEC restructure successivement les plans annuels de 1985 et de 1986, ainsi que le plan prospectif à l’horizon 2000. Le troisième congrès du PCC tient une première session en février 1986 mais le plan quinquennal (1986-1990) n’est pas approuvé en raison notamment des importations trop importantes qui y étaient incluses.
Les mesures concernant la diminution de la place du marché seront prises dès 1987. Les marchés libres paysans, réautorisés en 1980, sont supprimés. Le travail à compte propre (TCP), légalisé en 1978, est fortement restreint. Dans le même temps, des mesures de rigueur sont mises en place, comme l’augmentation du prix de certains produits non essentiels ou la baisse de certaines rations de la libreta[9].
Plusieurs éléments montrent une corrélation entre les mesures prises durant le processus de rectification et la contrainte extérieure, en particulier l’augmentation importante de la dette extérieure en MLC à partir de 1985, qui limite fortement les capacités d’importation de l’île et force l’État cubain à appliquer des mesures de centralisation des ressources, de réduction de la sphère privée et de limitation de la consommation afin d’éviter les effets inflationnistes.
L’augmentation de la dette en MLC ainsi que les contraintes à l’importation sont dues majoritairement à la dévaluation du dollar (Eckstein, 1994), sachant que les exportations cubaines étaient payées dans cette monnaie tandis que sa dette était exprimée en d’autres devises (Yen et monnaies européennes notamment) dont la valeur augmentait face au dollar (Larifla, 1995). La dette de Cuba en MLC augmente de 101,6% entre 1985 et 1990 contre 14,2% entre 1980 et 1985 (figure 1). Le 1er juillet 1986, Cuba suspend le paiement de sa dette (Ritter, 1988). De surcroît, la valeur des exportations chute de 37% en 1986 en raison également de la baisse du prix du sucre[10] et du pétrole[11] (figure 2) (Habel, 1989).

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Figure 1
 : Dette en MLC (en millions de pesos), Eckstein (1990)

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Figure 2
 : Prix du baril de pétrole brut de l’OPEP (En USD, moyenne annuelle), Statista (2020)

Les changements intervenus en URSS et dans les pays d’Europe de l’Est à partir de 1985 ont aussi des répercussions sur les échanges extérieurs cubains durant cette période. En effet, les échanges au sein du Conseil d’assistance économique mutuel (CAEM) devaient augmenter pour le quinquennat 1986-1990. Or, l’URSS, durant la Perestroïka et la Glasnost, avait décidé d’être moins généreuse avec les pays les moins développés du Conseil, et le volume des échanges est resté inchangé, ce qui contrevenait à ce qui avait été planifié. De plus, l’aide du CAEM chute de 888 millions de dollars en 1984 à 1,9 millions à la fin de la décennie, au moment de son démantèlement. (Eckstein, 1994).
Ces différents facteurs entraînent une chute importante des importations cubaines. Elles baissent de 32,5% entre 1985 et 1987 contre 18% pour les exportations (Ritter, 1988), tandis que 1987 est une année de dépression économique.
La réponse particulière des autorités cubaines aux tensions qui ont eu lieu sur le commerce extérieur et aux difficultés économiques visait à limiter l’inflation formelle par la restriction du secteur privé et du marché et à renforcer la gestion et l’allocation des ressources, plus rares, par une recentralisation des décisions économiques dans les mains de l’État.

    C. La « bataille des idées » (2003-2007)

Dans le cas de la troisième phase de recentralisation, les facteurs principaux de son enclenchement sont de nouveau économiques et externes. Le 6 mars 2003, Fidel Castro annonce le lancement de la « bataille des idées » afin de renforcer l’esprit révolutionnaire dans un contexte politique international difficile[12]. Au niveau économique, on assiste à une nouvelle centralisation de l’administration des devises après que des mesures de décentralisation ont été prises au cours des années 1990. Le système de compte unique est créé en 2005. Toutes les devises générées par les entreprises doivent être placées sur un compte de la Banque centrale de Cuba (BCC). La répartition de ces devises se fait ensuite centralement à travers le plan. Les opérations supérieures à 5 000 pesos convertibles (CUC) doivent être approuvées par la BCC à travers des comités d’approbation de devises (CAD).
Ce processus de centralisation a également été marqué par une restriction du secteur privé. Les IDE vont être réduits après une série de critiques émises par Fidel Castro, en particulier sur la mauvaise gestion des importations. On en compte 400 en 2002 et moins de 250 en 2006 (Vidal et Al., 2012). De même, l’octroi de licence pour les travailleurs à compte propre est restreint, suspendu pour certaines activités (chauffeur de taxi) et certains métiers auparavant autorisés sont interdits.
Le discours officiel du PCC énonçait que les objectifs de la « Bataille des idées » étaient de combattre la corruption et le manque de discipline, de corriger des erreurs néolibérales et capitalistes, de réduire les inégalités, de restaurer la morale révolutionnaire, et de répondre aux défis des États-Unis face aux discours belliqueux de l’administration de George W. Bush.
Cependant, des facteurs économiques externes ont frappé l’économie cubaine, et sous-tendu le processus de recentralisation. Les relations avec les États-Unis ainsi qu’avec les pays de l’Union européenne (UE) se crispent dès le début des années 2000 et particulièrement à partir de 2003[13], sachant que Cuba avait renoué des liens commerciaux plus importants avec ces deux zones depuis les années 1990 pour certains pays de l’UE et depuis 2000 pour les États-Unis[14]. D’un autre côté, la baisse du prix du sucre (figure 3) et l’augmentation de celui du pétrole (figure 4) sur les marchés internationaux au début des années 2000 ont généré des tensions sur le commerce extérieur. Les exportations cubaines baissent de 15% entre 2000 et 2002 et les importations de 13,5% (ONEI, 2017).

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Figure 3
 : Prix du sucre brut sur le marché mondial (En USD/livre, moyenne annuelle), Nova Gonzalez (2006)


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Figure 4
 : Prix du baril de pétrole brut de l’OPEP (En USD, moyenne annuelle), Statista (2020)

En outre, en réaction à la baisse du prix du sucre, les autorités cubaines décident de réorganiser le secteur sucrier en fermant un nombre important de centrales sucrières et en évinçant 100 000 travailleurs du secteur (Herrera, 2006). L’objectif est de conserver le même niveau de production, 4 millions de tonnes. Or, la production n’a jamais dépassé 2 millions de tonnes depuis lors, et cela a eu une incidence sur la production de dérivés. La bagasse, qui sert pour alimenter en énergie certains secteurs, voit sa production diminuer fortement. À partir de ce moment, les importations de pétrole par Cuba s’envolent[15] (Figure 5).

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Figure 5
 : Importations de combustibles, lubrifiants, minéraux et produits connexes (en milliers de pesos), ONEI (2018)

Cette corrélation que nous avons montrée entre les tensions sur le commerce extérieur et l’enclenchement des périodes de centralisation nous conduit à conclure que le facteur externe est décisif. La réponse des autorités cubaines face aux réductions des importations et donc de la production (contrôle centralisé des ressources monétaires et physiques), face à l’inflation et aux risques inflationnistes (restriction ou suppression du marché) n’est bien sûr pas une réponse unique à de tels phénomènes, mais selon nous, elle correspond aux caractéristiques de la politique économique du castrisme, à savoir une crainte aigüe de l’inflation formelle et une volonté de répartir équitablement les ressources rares entre les différentes unités économiques et administratives et au sein de la population.
Concernant les justifications politiques et idéologiques, nous ne les nions pas, mais disons qu’elles expliquent la forme que prennent les réponses du gouvernement cubain aux chocs externes négatifs. De surcroît, la survie du régime politique issu de la Révolution est évidemment un objectif des autorités cubaines, en toutes circonstances.

III. Vers la fin des politiques économiques de centralisation et de limitation du marché ? (2016-2018)

    A. Une nouvelle restriction du marché…

      Depuis l’arrivée au pouvoir de Raúl Castro en 2008, un cycle de décentralisation s’est enclenché. Fidel Castro étant caractérisé comme le facteur clé des revirements des politiques économiques (Mesa Lago, 2013), son retrait du pouvoir suivi par son décès en novembre 2016 aurait pu faire penser qu’il n’y aurait pas eu de nouvelles phases de centralisation.
Or, si nous analysons le processus d’« actualisation du modèle économique et social » qui, officiellement, se poursuit actuellement, nous pouvons mettre en évidence certaines pratiques économico-politiques qui permettent d’affirmer que les caractéristiques de la politique économique castriste que nous avons mis en évidence n’ont pas disparu avec le retrait de Fidel Castro du pouvoir.
Outre le fait que ce processus de décentralisation se met en œuvre de manière parfois très centralisée (Pineiro Harnecker, 2014), certains chocs exogènes récents ou potentiels ont entraîné un rétropédalage vis-à-vis de la décentralisation et de l’ouverture au marché opérées depuis 2008.
Ainsi par exemple, en 2015, les autorités cubaines avaient quasiment supprimé l’Acopio, l’organe de collecte de produits agricoles de l’État, et avaient transformé un grand nombre de marchés agricoles d’État (MAE) en marchés gérés par des coopératives non agricoles (CNA). L’année 2015 a été marquée par une forte sécheresse ainsi que par de fortes pluies localisées qui ont eu un impact négatif sur la production agricole. En raison de cela et du caractère marchand de la formation des prix, ces derniers ont augmenté sur les marchés où ils ne sont pas administrés, de plus en plus nombreux comparés aux MAE.
Malgré les discours du gouvernement qui stipulait, au début de cette crise, qu’il ne reviendrait pas à un système d’administration des prix, en mars 2016 l’Acopio a été remise sur pied, et le ministère du Commerce intérieur a repris le contrôle d’un grand nombre de marchés coopératifs. De plus, des prix plafonds ont été décrétés pour un certain nombre de produits alimentaires vendus sur des marchés non étatiques (MFP, 2016).
Nous pourrions également nous interroger sur le plafonnement des prix des taxis privés havanais, début 2017. L’été de cette même année, les autorités cubaines suspendent l’octroi de licences pour un certain nombre d’activités privées dont certaines parmi les plus courantes, telles les chambres d’hôtes, restaurants et cafétérias ou vendeurs de produits agricoles. Presqu’au même moment, il est décidé de stopper temporairement la création de CNA, dont le nombre n’aura augmenté que légèrement depuis 2013. Il en existait 429 en 2017 (Raúl Concepción, 2017).
En juillet 2018, des décrets, applicables en décembre 2018, ont clarifié la situation concernant les nouvelles régulations des TCP. La suspension d’octroi de certaines licences est abrogée, certaines activités fusionnent entre elles. On passe donc de 201 à 123 activités autorisées (Figueredo Reinaldo et Extremera San Martin, 2018). Une personne physique ne pourra pas exercer plus d’une activité, entre autres dispositions. Cependant, il ne sera plus émis de nouvelles licences pour cinq activités, dont vendeur de produits agricoles.
La nouvelle constitution approuvée au début de l’année 2019 donne plus de place au marché et au secteur privé. En février 2021, la suppression de la liste d’activités autorisées dans le cadre du TCP et son remplacement par une liste d’activité interdites - entres autres mesures - ouvrent de nouvelles perspectives pour le développement du secteur privé. Un léger recul historique sera nécessaire pour analyser ces changements récents. Pour cela, nous bornons la quatrième phase de centralisation de 2016 à 2018.

    B. … En réponse à un nouveau choc exogène négatif

Les raisons invoquées par le pouvoir pour expliquer les mesures prises entre 2016 et 2018 sont le relâchement fiscal, la corruption et la volonté de consolider les entités économiques déjà existantes (Puig Meneses, 2017). Mais la pause dans les réformes vers plus de décentralisation et de marché et la limitation des activités privées et de la sphère marchande sont intervenues au moment où Cuba connaissait un nouveau choc exogène négatif. En effet, à partir de la fin de l’année 2015, la crise économique et politique au Venezuela a eu des conséquences visibles sur l’économie cubaine, le Venezuela représentant 40% des échanges extérieurs cubains en 2014.
L’impact s’est fait sentir particulièrement sur les importations de pétrole - provenant en majeure partie du Venezuela à des prix préférentiels - sur les exportations des dérivés de produits pétroliers ainsi que sur les exportations de services médicaux dirigées principalement vers ce pays. Les échanges commerciaux avec le Venezuela ne représentaient plus que 17,7% des échanges totaux de Cuba en 2016 et 22,3% en 2018 (ONEI, 2017, 2019).
Le plan de l’économie nationale pour 2016 a été révisé en cours d’année, conduisant les autorités à limiter la consommation d’énergie, à diminuer les investissements et à réduire les importations. Pour la même année, les exportations chutent de 19,7% et les importations de 10,6% à prix constants. La corrélation entre le choc vénézuélien et son effet récessif sur l’économie cubaine et les mesures de restriction du marché mises en place entre 2016 à 2018 confirme davantage notre thèse émise pour les trois premières phases de centralisation.

Conclusion

         Les politiques économiques de centralisation et de décentralisation se sont succédé à Cuba depuis la Révolution de 1959. L’analyse des différentes phases de centralisation a permis de révéler l’existence de chocs exogènes négatifs précédant leur enclenchement. Ces liens ne peuvent être éludés, et leurs répétitions, tout au long de la période révolutionnaire cubaine, nous amènent à considérer ces corrélations comme fondamentales pour comprendre le basculement d’une phase de décentralisation vers une phase de centralisation.
Les facteurs politiques et idéologiques ont sans doute un rôle à jouer, mais les raisons économiques ont une incidence notable, primordiale, sur l’enclenchement des phases de centralisation.
Les périodes de centralisation et de limitation du marché sont donc une réponse, politique et/ou idéologique, particulière du pouvoir révolutionnaire cubain aux chocs exogènes négatifs, dans l’objectif de juguler l’inflation légale et formelle, de gérer l’ensemble ou la grande majorité de l’allocation des ressources et elle reflète une caractéristique ancrée dans la politique économique castriste. Les raisons idéologiques et/ou politiques, souvent invoquées, expliquent plutôt la manière dont les autorités cubaines vont répondre à ces chocs.
Cette mise en évidence de facteurs économiques externes, précédant l’ensemble des phases de centralisation, nous paraît être une analyse originale au sein de la littérature économique traitant de Cuba. Bien sûr, elle ne permet pas d’avoir une vision complète du caractère général du pouvoir révolutionnaire cubain, mais, selon nous, elle amplifie, ne serait-ce que quelque peu, l’éclairage que l’on peut en avoir. Ce travail nous a permis également de mettre en évidence une quatrième phase de centralisation, peut-être plus « atténuée » que les autres, mais obéissant aux mêmes logiques que les précédentes.
Les réformes importantes du début de l’année 2021 sont révélatrices d’une nouvelle période de décentralisation et traduisent un long cheminement, heurté, vers un accroissement du secteur privé depuis les années 1990. Cependant, affirmer que ces enchaînements de périodes sont révolus ou qu’une nouvelle phase de centralisation interviendra suite à un prochain choc exogène relèverait de la conjecture.

 

 Notes de fin

[1] « Typically, once the political leadership felt that the regime had been sufficiently strengthened under pragmatist policies, it launched a new idealist cycle, thus perpetuating a policy seesaw. »
[2] L’ensemble des citations en anglais ont été traduites par l’auteur.
[3] « Thus, we argue that political logic (preservation of the regime and control) has surmounted economic logic, giving rise to recurring idealist cycles. Moreover, increases in unemployment and inequality and other negative effects associated with the market seemed unacceptable to the political leadership (…) »
[4] Le SDPE est mis en place en 1976, un an après le premier congrès du Parti communiste cubain. Il avait vocation à organiser les relations entre les différentes institutions (entreprises ministères…) dans l’objectif de réduire la centralisation des décisions en renforçant l’autonomie et les incitations pour les entreprises et les travailleurs.
[5] Cuba est alors le pays ou le taux de moyens de production détenu par l’État est le plus élevé (Rodriguez, 1990).
[6] Les États-Unis étaient de loin le premier partenaire commercial de Cuba avant la Révolution.
[7] La pression sur les pays latino-américains à travers l’Organisation des États américains (OEA) a notamment été forte et plutôt couronnée de succès.
[8] Deux raisons peuvent être évoquées. Les différences de vision en termes de politique internationale, Cuba soutenant certains mouvements de guérilla, et la mauvaise utilisation des ressources octroyées par l’URSS à Cuba. Les livraisons reprendront après le soutien de Cuba à l’intervention soviétique en Tchécoslovaquie.
[9] Carnet d’approvisionnement créé en 1962 qui permet à chaque cubain de recevoir mensuellement une certaine quantité de biens à des prix subventionnés.
[10] Bien que l’URSS garantissait financièrement et en quantité les exportations cubaines de sucre, une partie de celui-ci était vendu en MLC aux pays à économies de marché. Cuba en profitait d’ailleurs, lorsque les prix du marché étaient relativement élevés, pour accroître ces exportations au détriment de ses engagements avec l’URSS (Larifla, 1995).
[11] Cuba réexportait du pétrole importé d’URSS sur le marché international. Cela représentait une de ses premières sources de revenus en MLC.
[12] Les périodes de centralisation sont aussi caractérisées par la relance de la ferveur populaire et de l’engagement révolutionnaire, à travers les mobilisations populaires telles les manifestations publiques ou le travail volontaire.
[13] Au printemps 2003, une vague d’arrestation touche 75 personnes présentées comme des prisonniers politiques par les États-Unis et l’Union européenne et comme des agents au service des États-Unis par les autorités cubaines.
[14] Depuis 2000, Cuba peut importer des États-Unis, sous conditions restrictives, des produits alimentaires et des médicaments. Depuis 2015, des assouplissements de l’embargo ont été actés, remis en cause à partir de 2017 suite à l’élection de Donald Trump.
[15] La nouvelle relation que Cuba entretiendra à partir de 2004, à travers l’Alliance Bolivarienne pour les Amériques (ALBA), avec le Venezuela, sera la bienvenue, afin de ne pas rendre les importations de pétrole trop onéreuses.

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Pour citer cet article
Jérôme Leleu, «Les mouvements pendulaires de recentralisation de l’économie cubaine : notes pour un débat (1960-2018)»RITA [en ligne], n°14 : septembre 2021, mis en ligne le 23 septembre 2021. Disponible en ligne: http://www.revue-rita.com/articlesvaria14/les-mouvements-pendulaires-de-recentralisation-de-l-economie-cubaine-notes-pour-un-debat-1960-2018.html