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    Pouvoirs et médias, pouvoir des médias
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Edito n°11

          Alors qu’en ce début d’été 2018, tous les regards sont portés sur la 21e Coupe du monde de football, les médias informent en temps réel sur les « nouvelles de Russie ». Les aventures de Neymar Jr. ou d’Edinson Cavani ouvrent les journaux télévisés alors que l’on assiste à des débats enflammés sur le pourquoi de l’absence du « Kun » Agüero dans le 11 titulaire argentin ou sur l’intérêt de jouer en 4-3-3 plutôt qu’en 3-5-2. La presse s’est également délectée de relayer les propos de l’icône Diego Maradona qui, avant de se rétracter, a défrayé la chronique en taxant la FIFA d’institution « vieille et corrompue » sur TELESUR.

Ainsi, qu’on le veuille ou non, nous voilà happés par la planète football. Les médias ont fait de cet événement un objet central de l’actualité, en le traitant sous tous les angles et en lui consacrant toutes sortes d’analyses, au point d’éclipser certains événements majeurs. Pourtant, dans le même temps, Andrés Manuel Lopez Obrador, dit AMLO, vieux routier de la gauche mexicaine, a été élu président de son pays en promettant de combattre la corruption et de renforcer les programmes sociaux. Sur le plan diplomatique, son premier acte a été de s’adresser directement à Donald Trump, plus que jamais obsédé par la question migratoire, en vue d’apaiser les relations entre les Etats-Unis et le Mexique. En Colombie, la blessure du meneur de jeu James Rodriguez et l’élimination de la Tricolor en huitièmes de finale ont fait couler beaucoup d’encre. Mais le pays a élu, ne l’oublions pas, le très uribiste Yván Duque à la présidence de la République, confirmant son ancrage très à droite sur l’échiquier politique régional.

Ces dernières semaines, le football a donc été au cœur du jeu médiatique. Ce constat témoigne sans conteste du pouvoir des médias à classer et à hiérarchiser l’information, à rendre visible un événement plutôt qu’un autre et, in fine, à orienter l’opinion. Certains sujets tels que le football, plus vendeurs, rythment ainsi l’actualité au sein de laquelle les analyses politiques sont diluées au centre de quelques commentaires sensationnalistes, comme le suggérait Patrick Champagne dans La misère du Monde[1].

C’est donc en cherchant à produire une réflexion critique sur le « pouvoir des médias » et sur la relation entre « pouvoirs et médias » que RITA a voulu consacrer la partie Théma de son 11e numéro à ce sujet: Pouvoirs et médias, pouvoir des médias.

Les articles présentés ci-dessous contribuent à nous interroger sur l’influence des médias officiels et alternatifs dans le choix des thématiques abordées à l’échelle sociale et politique. Quelles sont les comparaisons possibles entre les sujets traités dans les différentes catégories médiatiques ? Comment analyser la politisation des médias ou leurs engagements sociaux ? Quels sont les sujets sociaux et politiques discutés dans les médias américains et comment sont-ils abordés ? Quels sont les nouveaux outils et supports de diffusion mobilisés pour reproduire ou s’opposer au discours officiel ?

Dans la rubrique Dossier, Elena Sidorova propose un regard rétrospectif original sur le lien entre la presse de divertissement et la politique à partir de la couverture de la revue Rolling Stone lors de la campagne présidentielle américaine de 1972. Son article démontre comment cette revue est devenue une alternative aux médias traditionnels et conservateurs de l’époque, tant dans la forme que dans le contenu. Sur une période plus récente, Janny Amaya Trujillo exploite un corpus de telenovelas cubaines pour expliquer comment ces feuilletons télévisés, au service du pouvoir, ont reproduit l’idéologie de la révolution cubaine et ont soutenu le régime castriste durant la crise économique des années 1990 tout en étant perçues comme dépolitisées. En ce qui le concerne, Americo Mariani propose une analyse interactive entre les sphères privée et publique : il explique comment l’exposition médiatique de la figure de victime participe à la construction de l’espace public en Argentine. Il interroge notamment la corrélation entre l’exposition médiatique rapide de la figure victimaire et sa portée politique limitée.

Dans la rubrique Trait d’union, Wilq Vicente s’interroge sur la popularisation de la vidéo dans le répertoire collectif de la communication alternative et des mouvements sociaux brésiliens en périphérie des grands centres urbains tels que São Paulo. Comment la vidéo est-elle devenue un outil de protestation pour les organisations sociales et comment les courts-métrages dits « populaires » ont-ils trouvé un espace de diffusion au Brésil ?

Enfin, Nasser Rebaï, membre du Comité de Rédaction de RITA, clôt ce dossier en proposant pour la rubrique Rencontre un entretien avec le réalisateur de documentaires Pierre Carles. L’échange met en évidence le regard critique que le réalisateur français porte sur le fonctionnement des médias de masse et plus particulièrement sur le traitement de l’actualité latino-américaine par les grands médias hexagonaux. Il nous livre également son regard critique sur l’actualité sociopolitique de différents pays sud-américains à travers son expérience personnelle et professionnelle et déplore l’existence en France d’une pensée dominante conservatrice sur les Amériques.

Pour son 11e numéro, RITA propose comme à son habitude une section Champ Libre qui réunit plusieurs articles aux sujets variés.

Pour la section Résumés de mémoire, Maria Julia Giménez propose d’analyser, à travers les grands médias nationaux, l’influence du think tank nommé Institut Millenium sur la définition des problèmes sociaux dans les projets politiques constitués lors de l’inauguration du 3ème programme national des droits de l’homme dans ce pays. L’article interroge également les choix éditoriaux pour définir les problèmes sociaux qui sont discutés dans les médias brésiliens.

Toujours au Brésil, dans les Regards, Isabel Lustosa, nous propose son regard - celui d’une chercheuse et militante brésilienne vivant la situation en contexte - sur l’actualité brésilienne. Son analyse fait écho aux propos de Pierre Carles et s’intéresse notamment au traitement médiatique de la crise politique et sociale au Brésil depuis la destitution de Dilma Rousseff. Elle nous offre ainsi un point de vue particulièrement intéressant sur l’« apparente reddition » de Lula, en le reliant à la trajectoire syndicale et politique de l’ex-président brésilien. Dans un contexte politiquement troublé et à la veille d’élections présidentielles incertaines (les dimanches 7 et 28 octobre 2018), cet article questionne également la situation complexe d’un ancien président: détenu depuis quelques mois, il est peu probable qu’il puisse se présenter aux élections, mais il est malgré tout actuellement favori dans les sondages. Publié en portugais, cet article sera prochainement disponible en traduction française.

Enfin, dans le premier essai littéraire publié par RITA, Sous-Lieutenand’ès Pontif s’interroge, dans une déambulation dunkerquoise, sur l’imposition du modèle architecturale nord-américain dans la reconstruction des villes françaises dans l’après-Seconde Guerre mondiale. Cet essai nous invite à redécouvrir l’histoire contemporaine à travers l’urbanisation; il nous propose également de reconsidérer la capacité de la littérature de créer des jeux d’échelles spatiales et temporelles. Pour finir, Caroline Weill nous invite à penser de manière engagée la violence de genre au travers des réseaux sociaux au Pérou. Son point de départ porte sur les débats sociopolitiques engendrés par l’utilisation du hashtag controversé #PerúPaísDeVioladores, et sur les dynamiques actuelles des mouvements féministes au Pérou.

Avant de vous laisser découvrir ce numéro 11, nous souhaitons remercier chaleureusement nos auteur-e-s et nos lecteurs et lectrices pour leur collaboration à l’aboutissement de ce numéro. Bonne lecture à toutes et à tous.

Bruno Hervé, Guillaume Duarte et Nasser Rebaï, membres du Comité de Rédaction de RITA.

[1] Bourdieu Pierre (dir.) (1993). La Misère du monde. Paris : Seuil.