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La communauté noire au Venezuela: de l'esclavage à la reconnaissance culturelle

L’implantation de la communauté noire au Venezuela, au début du XVIe siècle, est synonyme de souffrance pour l’ensemble de ses membres. Réduits en esclavage et affectés aux tâches les plus rudes, ils sont les principaux artisans du développement économique du pays, mais les seuls à n’en tirer aucun profit. Par la suite, l’expansion de la traite négrière conjuguée avec le processus de métissage qui se met en place entre les différentes races, et ce, malgré toutes les ordonnances édictées par la Couronne espagnole, entraîne une importante augmentation du nombre d’Afro-descendants...

... Las du traitement qui leur est infligé, ils se révoltent et entrent en opposition avec le régime colonial, puis avec les autorités vénézuéliennes une fois l’indépendance nationale acquise. Au terme d’une longue lutte qui passe par diverses étapes, ils obtiennent enfin leur liberté et acquièrent des droits. Malgré l’obtention de la citoyenneté, hormis deux ou trois exceptions, les membres de la communauté noire ne jouissent d’aucune représentativité politique et souffrent toujours d’un manque de visibilité dans le panorama national. Toutefois, depuis l’accession au pouvoir d’Hugo Chávez et l’instauration d’une démocratie participative, des changements s’opèrent grâce, notamment, à la mise en place de divers projets visant à favoriser la participation des Afro-vénézuéliens à la vie politique, économique, sociale et culturelle de la nation.

Mots clés : Venezuela ; Communauté noire ; Esclavage ; Luttes ; Participation politique ; Reconnaissance culturelle.

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Olivier Folz

 

Docteur en Histoire

Université Nancy 2

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La communauté noire au Venezuela :

de l’esclavage à la reconnaissance culturelle

 

 

 

Introduction

 

          2011 a été déclarée année internationale des personnes d’ascendance africaine. Cette résolution prise le 19 mars 2010 par l’Assemblée générale des Nations Unies (Nations Unies, 2010 : 1) poursuit plusieurs objectifs. Elle vise, tout d’abord, à « garantir » aux Afro-descendants « le plein exercice des droits économiques, culturels, sociaux, civils et politiques » (Nations Unies, 2010 : 2). Elle tend également à favoriser leur intégration à la société. Enfin, elle a pour but de « promouvoir une meilleure connaissance et un plus grand respect de la diversité de leur patrimoine et de leur culture » (Nations Unies, 2010 : 2). Dans ce cadre précis, les autorités vénézuéliennes, en partenariat avec des associations issues de la société civile(1), mettent en place une série de manifestations à l’échelle nationale. Au-delà de l’aspect commémoratif, cet évènement nous donne l’occasion de nous interroger sur le rôle que le gouvernement dirigé par Hugo Chávez entend faire jouer à la communauté noire au sein du nouveau modèle politique qu’il souhaite instaurer. En effet, le projet d’établir une démocratie participative et protagoniste passe, selon nous, par une redéfinition de la mémoire collective qui permettrait d’offrir une plus grande visibilité aux Afro-Vénézuéliens et favoriserait leur participation active à ce processus. Pour mener à bien notre réflexion, nous préciserons, au préalable, les modalités d’implantation de la population africaine au Venezuela, ainsi que le rôle social et économique de ses membres tout au long de la période coloniale. Ensuite, nous porterons notre attention sur les luttes et autres évènements historiques qui permettent aux esclaves noirs de s’affranchir et d’acquérir progressivement des droits politiques. Enfin, nous tenterons de mettre en lumière les moyens mis en œuvre par les autorités gouvernementales pour tenter de valoriser la culture afro-vénézuélienne afin que ses membres s’investissent dans le nouveau modèle politique, économique et social inscrit dans la Constitution de 1999.

 

I. Implantation de la communauté noire au Venezuela

          L’arrivée des premiers Africains subsahariens au Venezuela remonte probablement à 1498, à l’occasion du troisième voyage de Christophe Colomb aux Indes. Au cours de ce périple, l’amiral génois fit une escale de dix jours dans l’archipel du Cap-Vert (Las Casas, 2002: 754-755) où, depuis 1470, les Portugais se livrent au commerce d’esclaves africains (Thomas, 2005: 54, 57). Par ailleurs, dès le début de la conquête, les Espagnols arrivent au Nouveau Monde en compagnie de Noirs (Herrera Salas, 2003: 64), des ladinos(2), qui, pour la plupart, sont domestiques.

Cependant, les premières licences octroyées par la couronne espagnole pour importer massivement des esclaves noirs au Venezuela, dans le but d’exploiter économiquement ce territoire, sont délivrées en 1525. Pour les autorités espagnoles, l’attribution de ces concessions présente deux avantages : elle représente une importante source de revenus et l’envoi de cette nouvelle main-d’œuvre leur permet d’intensifier leur entreprise de colonisation outre-mer. À cet effet, dès 1526, des esclaves noirs arrivent sur l’île de Cubagua(3) (Acosta Saignes, 1978: 108), haut lieu de l’industrie perlière coloniale et premier centre d’établissement espagnol au Venezuela. Sur place, la majorité d’entre eux travaillent comme pêcheurs de perles et remplacent progressivement les Indiens (Las Casas, 2002: 258).

Le commerce lié à l’importation des Noirs prend une autre dimension le 12 février 1528, date à laquelle l’empereur Charles Quint accorde à Enrique Ehinger et Gerónimo Sayler une licence pour introduire quatre mille esclaves aux Indes sur une période de quatre ans. Deux mois plus tard, il les autorise à conquérir la province du Venezuela pour la pacifier et la peupler(4). Nous assistons alors à l’arrivée d’esclaves noirs non plus en provenance d’Espagne, mais directement d’Afrique subsaharienne. Appelés bozales, ceux-ci ne parlent pas l’espagnol.

L’administration de la province du Venezuela par les Allemands ouvre une nouvelle phase dans la mesure où, parallèlement à la traite négrière, ces derniers commencent un travail de prospection des sous-sols. En 1551, la découverte des mines de Chirgua, puis de Buría, respectivement situées dans les actuels États de Lara et de Yaracuy, amorce réellement l’exploitation de l’or. Pour ces travaux, l’importation d’esclaves noirs s’avère, une fois encore, indispensable (Brito Figueroa, 1979: 67 ; Acosta Saignes, 1978: 109). En conséquence, à partir de la seconde moitié du XVIe siècle, le nombre d’esclaves noirs introduits au Venezuela connaît une très nette augmentation (Brito Figueroa, 1978: 103). De plus, le marché légal ne suffisant pas à pourvoir aux besoins, le commerce interlope connaît un essor fulgurant. Pour acquérir toujours plus de main-d’œuvre africaine, les colons s’approvisionnent soit auprès des contrebandiers, qui accostent régulièrement le long du littoral vénézuélien, soit en commerçant directement avec les négriers des îles caribéennes voisines (Acosta Saignes, 1978: 59).

Dans les nombreux gisements aurifères en exploitation, la plupart des esclaves noirs travaillent en qualité de mineurs, de porteurs et de fondeurs. D’autres, peu nombreux, sont prospecteurs et jouissent d’un régime de faveurs. Grâce à la découverte de nouveaux filons, certains obtiennent même leur liberté (Acosta Saignes, 1978: 109-110). Par la suite, le faible rendement des mines d’or conduit les Espagnols à privilégier l’exploitation du minerai de cuivre. À titre d’exemple, en 1620, la mine de Cocorote(5) concentre, à elle seule, plus de cent esclaves noirs (Acosta Saignes, 1978: 116). En somme, du premier quart du XVIe siècle jusqu’à la moitié du XVIIe siècle, la majeure partie des richesses extraites des fonds marins et du sous-sol vénézuélien, destinées à enrichir la couronne espagnole et, indirectement, les colons, est, en grande partie, le fruit du travail des esclaves noirs.

Tout au long de cette période, les tâches assignées aux Africains subsahariens ne se circonscrivent cependant pas uniquement à ces seuls labeurs. En marge des activités perlières et minières, ces derniers jouent un rôle primordial dans les campagnes militaires de conquête du territoire. Comme dans les autres provinces des Indes, ils se battent, aux côtés des conquérants, contre les indigènes qui refusent de se soumettre à l’autorité de la couronne espagnole (Tardieu, 1984: 117). Ils prennent également une part active, conjointement avec les autochtones, à la construction des voies de communication et à l’édification des centres urbains, à mesure que progresse l’organisation territoriale et politique du pays. L’Église, autre pilier de l’autorité coloniale, possède, elle aussi, des esclaves noirs affectés à la construction de lieux de culte et aux tâches domestiques (Flores, 2004: 71 ; Brito Figueroa, 1985: 186-187). En somme, dès leur introduction au Venezuela, les Noirs collaborent activement au processus de colonisation mais sans en tirer aucun profit, du fait de leur condition d’esclaves.

À partir de la seconde moitié du XVIIe siècle, l’abandon progressif de l’exploitation minière constitue un nouveau point d’inflexion. Découragées par les faibles profits obtenus, les autorités espagnoles optent pour développer le sectuer agricole. Rapidement, la production de cacao supplante celle du tabac et du cuir de vache pour devenir le principal produit d’exportation (Brito Figueroa, 1978: 196-222). Derechef, l’élément africain va jouer un rôle prépondérant. De plus, en 1689, la promulgation d’une ordonnance royale imposant la fin du service personnel et la rémunération du travail des indigènes (Brito Figueroa, 1978: 301), entraîne une intensification de la demande de Noirs. Pour y répondre, la couronne espagnole vend des contrats d’importation (asiento) à des particuliers, puis aux pays alliés en fonction de la conjoncture internationale. Par le biais de compagnies(6), ceux-ci s’engagent à fournir aux colonies espagnoles du Nouveau Monde les quantités d’esclaves nécessaires à son développement, en échange de permis de négocier aux Indes.

L’entrée dans le XVIIIe siècle n’apporte pas de changements substantiels. Les plantations de cacao se multiplient sur une grande partie de la côte vénézuélienne, engendrant un besoin toujours plus grand d’esclaves noirs. À la fin du siècle, la culture naissante du café et de l’indigotier accroît encore un peu plus ce phénomène. La demande dépassant largement l’offre, les planteurs et éleveurs vénézuéliens ont alors recours à l’économie de troc. Avec l’assentiment des autorités locales, ils acquièrent auprès des négriers des îles des Caraïbes des esclaves en échange de produits agricoles ou de bétail (Brito Figueroa, 1978: 110). Parallèlement, l’essor des grandes villes s’accompagne d’un accroissement de l’esclavage domestique. La majorité de ces serviteurs sont des femmes. À l’instar de la Negra Hipólita et de la Negra Matea, toutes deux nourrices de Simón Bolívar, outre les tâches ménagères, elles ont en charge l’allaitement et la garde des enfants. De la même façon, de plus en plus d’esclaves hommes sont formés aux métiers de l’artisanat (Ramos Guédez, 2001: 135).

Durant ces trois siècles, le nombre d’Africains subsahariens importés légalement et illégalement au Venezuela est estimé à environ 120.000(7) (Brito Figueroa, 1978: 121). La plupart d’entre eux sont originaires de la région du golf de Guinée, ainsi que de la zone comprise entre le Congo et l’Angola. À ceux-ci, s’ajoutent les esclaves en provenance des Antilles et, plus particulièrement de l’île de Curaçao. Au fil du temps, même si la législation interdit et condamne toute union entre les Noirs et les Blancs et, dans une moindre mesure, entre les Noirs et les indigènes (Salcedo-Bastardo, 2004: 101), nous assistons à une importante modification de la composition ethnique. Un phénomène de métissage s’opère au sein de la population et de nouvelles composantes émergent(8). L’élément africain et ses diverses déclinaisons deviennent alors très largement majoritaires. Toutefois, en dépit de cette prédominance numérique et du rôle majeur qu’ils jouent dans le développement économique du Venezuela colonial, les esclaves et leurs descendants ne jouissent d’aucun statut juridique. Les ordonnances royales promulguées depuis le XVIe siècle, dont le Code noir de 1789, tendent plus à établir des règles de conduite aux maîtres et à imposer des devoirs aux esclaves qu’à leur octroyer des droits. À l’aube du XIXe siècle, cette situation génère de plus en plus de tensions au sein d’une société régie par un implacable système de caste.

 

II. Vers la citoyenneté

          Les premiers signes de mécontentement ne datent pourtant pas de cette époque. Dès leur arrivée au Venezuela, les Noirs tentent d’échapper à leur condition d’esclaves. Dans un premier temps, ils recourent au marronnage. Le plus souvent, ils se réfugient dans des lieux difficiles d’accès où ils rejoignent des communautés, des cumbes(9). À mesure que le temps passe, cette pratique s’intensifie et les cimarrones(10) sont chaque jour plus nombreux(11). Outre le fait de s’affranchir sans l’accord de leur propriétaire qui, de ce fait, perd une partie de son capital, le marronnage engendre d’importantes pénuries de main d’œuvre et met à mal une économie locale incapable de progresser sans la participation des esclaves (Tardieu, 1984: 281-282). La rapine, conjuguée avec les attaques d’haciendas pour libérer les esclaves qui y travaillent et qui se soldent bien souvent par la mise à mort des maîtres, crée également un climat d’insécurité. Malgré les multiples mesures coercitives prises par la couronne espagnole (Tardieu, 1984: 283-295, Acosta Saignes, 1978: 178-198), les hordes de nègres marrons fomentant la révolte prolifèrent un peu partout dans le pays. À titre d’exemple, en 1552, Miguel del Barrio, un esclave en fuite fonde, dans l’actuel État de Yaracuy, une communauté de plus de deux cent cinquante personnes avec lesquelles, trois années durant, il assaille les villages environnants et délivre les esclaves (Herrera Salas, 2003: 104-108).

À partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle, les dissensions s’accentuent encore un peu plus. Deux facteurs essentiels y concourent. En premier lieu, même si l’esclavage n’est toujours pas aboli, le nombre de Noirs libres est en constante augmentation. Mais, quelles que soient les modalités d’affranchissement(12), une batterie de dispositions légales les maintient dans une situation peu ou prou analogue à celle des esclaves (Brito Figueroa, 1985: 299-301). En second lieu, toutes les personnes bénéficiant du statut d’hommes libres, mais qui ne sont pas de race blanche ou péninsulaires restent cantonnées dans des emplois subalternes qui les empêchent de s’élever socialement (Salcedo-Bastardo, 2004: 145). En réponse à ces discriminations qui touchent 80 % de la population dont 60 % est d’origine africaine(13), plusieurs insurrections éclatent. Fortement influencés par la Révolution française et les évènements de Saint-Domingue, ces mouvements ne revendiquent plus seulement la liberté des esclaves. Leurs instigateurs aspirent désormais à impulser des changements politiques profonds. À titre d’exemple, l’insurrection de 1795, dans la région de Coro, conduite par José Leonardo Chirino, un Zambo libre, et celle de Maracaibo, en 1799, menée par un Pardo du nom de Francisco Javier Pirela, ont pour objectif de renverser le pouvoir en place afin d’instaurer une République dans laquelle tous les citoyens seraient égaux en droit (Ortega Dávila, 2001: 99, Guzman Silva, 2001: 115). Tous ces soulèvements(14) sont violement réprimés dans le sang par le pouvoir colonial avec le soutien des grands propriétaires terriens majoritairement blancs.

Ainsi, lorsque qu’en 1810, sous l’impulsion des mantuanos(15), le Venezuela se déclare indépendant et que ces derniers doivent faire face à la réaction espagnole, ils n’obtiennent pas le soutien escompté de la communauté noire. En fait, outre le ressentiment éprouvé par ses membres envers ceux qui, conjointement aux Espagnols, les ont opprimés pendant presque trois siècles, ceux-ci n’entrevoient pas les changements tant attendus. Certes, la Constitution de 1811 interdit le commerce d’esclaves dans le pays, mais elle n’abolit pas l’esclavage. Par ailleurs, même si elle reconnaît le principe de l’égalité entre tous les citoyens, le suffrage est censitaire et réservé aux hommes libres (República bolivariana de Venezuela-Asamblea Nacional, 2003: 16, 26-28). Aussi, les esclaves noirs et leurs descendants préfèrent-ils se battre aux côtés des Espagnols qui leur promettent la liberté et des terres (Liévano Aguirre, 1974: 127-128), que d’embrasser la cause révolutionnaire.

Conscient que sans leur appui, l’action des indépendantistes est vouée à l’échec, leur leader, Simón Bolívar prend des mesures qui répondent enfin aux aspirations sociales et politiques des masses populaires d’origine africaine. Il décrète tout d’abord la liberté absolue des esclaves et de tous les membres de leur famille en échange de leur incorporation dans l’armée révolutionnaire (Bolívar, s/d : 634-635). Ensuite, il ordonne la répartition des biens nationaux(16) en faveur des militaires (Acosta Saignes, 1997 : 201). Octroyés sous forme de bons de valeurs, une fois le conflit achevé, ce pécule offre la possibilité aux soldats de progresser socialement. Enfin, la Charte constitutionnelle de 1819 octroie aux militaires ayant combattu pour la liberté et l’indépendance du pays le statut de citoyen actif(17). En d’autres termes, tous les soldats de l’armée indépendantiste, obtiennent le droit de suffrage, et ce, malgré le maintien du cens électoral et des autres conditions restrictives. Séduits par ces dispositions, des milliers de Noirs intègrent l’armée républicaine (Lara, 1983: 229). Réunis au sein d’un collectif bigarré, ils jouent un rôle de premier ordre dans le processus émancipateur qui s’achève le 24 juin 1821, lors de la bataille de Carabobo. Leonardo Infante et Pedro Camejo, un ancien esclave de la région d’Apure, en sont la parfaite illustration(18).

Au sortir de la guerre d’indépendance, à l’instar des structures sociales et politiques de l’ancien régime, le système esclavagiste est profondément modifié. En effet, malgré les réticences des grands propriétaires terriens, les esclaves obtiennent, d’une façon ou d’une autre, leur manumission. Par ailleurs, les nègres marrons engagés dans l’armée républicaine ne craignent plus d’être repris ou d’avoir à faire à la justice. D’aucuns reçoivent même des distinctions honorifiques(19) qui les élèvent au rang de héros nationaux. Quant aux Noirs libres, les Pardos, ils acquièrent des droits qui font d’eux des citoyens à part entière.

Cette embellie est de courte durée. Suite à la création de la Grande-Colombie(20), le Congrès de Cúcuta, dont la mission est de donner un cadre juridique au nouvel État, adopte, le 19 juillet 1821, la Loi sur la liberté des accouchements, la manumission et l’abolition du trafic d’esclaves. Selon celle-ci, les enfants d’esclaves nés à partir de la date de promulgation de ladite loi sont déclarés libres. Toutefois, en guise de dédommagement des frais d’habillement, d’alimentation et d’éducation engagés par leur maître, ceux-ci doivent rester à son service jusqu’à leur dix-huit ans (Salcedo-Bastardo, 2004: 345). En outre, la Constitution de 1821 ne ratifie pas l’abolition de l’esclavage et la répartition des terres n’est toujours pas effective. À cela s’ajoute la démobilisation des soldats de l’armée Libertador qui perdent leur solde et retournent donc à la vie civile sans avoir reçu les récompenses promises (Vallenilla Lanz, 1991: 86). Sans ressource, de nombreux Noirs libres n’ont d’autre choix que d’aller travailler en qualité de journalier dans les plantations en lieu et place des esclaves qui, eux, fuient pour ne pas y retourner. Ensuite, en 1830, une fois la grande-Colombie dissoute, la nouvelle Constitution vénézuélienne restreint les droits afférents à la citoyenneté et reconduit le suffrage censitaire (República bolivariana de Venezuela-Asamblea Nacional, 2003: 125). De plus, cette même année, alors que l’esclavage n’est toujours pas aboli, le Congrès passe l’âge légal de la manumission de dix-huit à vingt et un ans (Brito Figueroa, 1985: 371).

En réponse à toutes ces mesures restrictives, nous assistons, dès 1821, à une recrudescence des révoltes des esclaves noirs et de leurs descendants. Les tensions atteignent leur paroxysme en 1846 quand, sur fond de crise économique et de montée de l’idéologie libérale, l’insurrection s’étend à presque tout le pays et débouche sur la guerre fédérale. Il faut attendre l’abolition de l’esclavage, le 24 mars 1854, et surtout la promulgation de l’égalité politique et sociale dans la Charte de 1864(21) pour que le pays se pacifie à nouveau.

Au terme d’une longue lutte, les esclaves noirs et leurs descendants accèdent enfin au statut de citoyen et jouissent donc des mêmes droits que leurs compatriotes. Ces avancées juridiques sont capitales. Non seulement elles offrent aux membres de la communauté noire la possibilité de s’intégrer pleinement dans la société vénézuélienne, mais en outre elles leur permettent de pouvoir enfin percevoir les bénéfices de la prospérité nationale dont ils sont les principaux artisans.

 

III. La Ve République et les Afro-descendants

           L’acquisition de ces droits ne suffit cependant pas à éliminer les préjugés raciaux envers les Noirs. De 1840 jusqu’en 1955, les autorités gouvernementales, convaincues que ces deniers ne sont pas à même de participer de la transformation du Venezuela en un État moderne, favorisent l’immigration européenne, c’est-à-dire blanche (García, 2007: 114-115). Par ailleurs, les manuels scolaires ont, pendant longtemps, sous-estimé les luttes menées par les membres de la communauté noire pour l’obtention de leur émancipation politique et sociale. Dans la plupart des cas, celle-ci est uniquement considérée comme la résultante des mesures prises par Simón Bolívar pendant la guerre d’indépendance (López, 2007). Cette approche réductrice des évènements historiques, a pour conséquence de renvoyer aux Afro-vénézuéliens une image déformée d’eux-mêmes, celle d’un groupe atone, incapable de se prendre en main pour échapper à sa condition servile. À un autre niveau, les Noirs pâtissent d’un manque flagrant de représentation politique. Peu d’entre eux, pour ne pas dire aucun occupent des postes importants au sein des directions nationales des principales formations politiques. À titre d’exemple, dans la dernière décade du XXe siècle, hormis Aristóbulo Istúriz, dirigeant de La cause radicale (LCR) élu maire de Caracas en 1992, et Claudio Fermín, qui reçoit l’investiture d’Action démocratique (AD) pour les élections présidentielles de 1993, les élites politiques sont, elles aussi, pour la plupart, blanches. Plus encore, du point de vue socio-économique, les membres de la communauté noirs représentent le plus gros contingent des secteurs les plus défavorisés (García, 2007: 117). Regroupés dans des zones marginalisées, la plupart d’entre eux ont un accès très limité aux services publics et plus particulièrement à la santé et à l’éducation ce qui, en aval, compromet toute ascension sociale.

Tous ces facteurs négatifs posent problème aux actuelles autorités en place. En effet, arrivé au pouvoir en 1998 dans un contexte de crise économique, sociale et institutionnelle, le leader de la révolution bolivarienne, Hugo Chávez, est porteur d’un projet qui se veut en rupture par rapport à la période dite de Punto Fijo. D’un point de vue général, il s’agit d’instaurer une démocratie de type participative à l’intérieur de laquelle les citoyens ont un rôle central à jouer dans la mesure où ils deviennent les principaux protagonistes du nouveau système politique inscrit dans la Constitution de 1999. Cette tâche s’avère ardue. Outre les facteurs déjà mentionnés, depuis 1984, le taux d’abstention électorale n’a cessé d’augmenter (Brandler, 2007: 37), laissant transparaître un désintérêt croissant des citoyens pour les affaires politiques. Aussi, pour endiguer ce phénomène et encourager les Vénézuéliens dont ceux appartenant à la communauté noire à s’investir pleinement dans le processus révolutionnaire, le gouvernement bolivarien met en place plusieurs actions à leur intention.

Avant d’aborder les divers moyens utilisés pour atteindre cet objectif, il convient de souligner que la physionomie d’Hugo Chávez constitue déjà en soi un facteur favorable. En effet, pour la première fois dans l’histoire du Venezuela, le président de la République porte en lui les marques d’un fort métissage. D’extraction modeste, Hugo Chávez est le prototype parfait du Zambo, mélange d’Indien et de Noir. Cheveux crépus, teint cuivré, et lèvres saillantes sont quelques unes des caractéristiques qui permettent aux Afro-descendants de s’identifier à lui. De la même façon, la nomination de personnalités issues de la communauté noire à des postes clefs de l’administration chaviste(22) favorise l’empathie des Afro-Vénézuéliens envers ces personnes et, par voie de conséquence, leur adhésion au régime.

Concentrons-nous, à présent, sur les procédés mis en œuvre. Au niveau institutionnel, la nomination de secrétaires d’État auprès du ministère des Affaires étrangères et du ministère de la Femme, chargés, pour le premier, des relations avec l’Afrique et, pour le second, des droits des femmes Afro-descendantes témoigne de l’intérêt du gouvernement pour les Vénézuéliens d’origine africaine.

Les autorités gouvernementales encouragent également la création d’associations telles que la Red de organización afrovenezolana (ROA). Fondé le 23 juin 2000, cet organisme rassemble diverses structures associatives qui, depuis plusieurs années déjà, militent en faveur des droits des Afro-descendants et de leur culture. Toutefois, sa mission principale est de constituer et d’organiser, dans tout le pays, les communautés d’origine africaine afin que ses membres s’insèrent dans les projets de développement locaux, régionaux et nationaux, tel que le prévoient les articles 182, 184 et 185 de la Constitution (Red de organización afrovenezolana, 2010). D’ailleurs, les démarches engagées par l’association auprès des diverses instances gouvernementales ont abouti à l’adoption de lois et autres mesures innovantes. Parmi celles-ci, nous citerons la récente Loi contre les discriminations raciales, l’instauration de la journée de « l’Afro-venezolanité » ou bien encore la création, au sein du ministère du pouvoir populaire de la Culture, d’un bureau de liaison avec les communautés Afro-vénézuéliennes afin de garantir les droits culturels de cette population. La fondation de la radio communautaire Negro Primero, en 2002, répond aux mêmes impératifs. Installée au nord de la capitale, dans le quartier Pedro Camejo, son objectif premier est de mettre en relief les valeurs et les multiples facettes de la négritude. Néanmoins, avec le concours des autorités locales et gouvernementales, elle organise également des manifestations afin d’inciter les membres de la communauté noire à s’organiser dans l’optique d’améliorer les conditions de vie du quartier(23).

La publication, en 2005, de la Constitución ilustrada de la República bolivariana de Venezuela constitue un autre moyen d’action. Édité par le Ministère de l’Éducation et distribué dans de nombreux établissements scolaires, cet ouvrage de quatre cent dix-huit pages, à la fois ludique et didactique, s’adresse avant tout aux jeunes vénézuéliens. Pour bien appréhender l’enjeu de cette démarche, il faut souligner, au préalable, que la réalisation du projet bolivarien de transformation de la société vénézuélienne s’étale sur une période de vingt ans (Chávez Frías, 2001: 9). L’objectif est donc d’éduquer les jeunes générations afin qu’elles s’imprègnent, dès maintenant, de ces nouvelles valeurs. Cela étant, l’ouvrage présente les trois cent cinquante articles de la Charte constitutionnelle illustrés sous la forme d’une bande dessinée qui rend le texte beaucoup plus abordable pour les enfants. L’idée est pertinente car cette présentation n’ôte en rien la valeur symbolique de la Constitution, à savoir incarner une rupture. Le préambule de la Charte de 1999 est, à cet égard, assez révélateur puisqu’il stipule que « la refonte de la République vise à instaurer une société multi-ethnique et pluriculturelle » (Constitución de la República bolivariana de Venezuela, 2000: 3), alors que celui de la Constitution de 1961 n’abordait pas ce sujet.

Plus concrètement, la Constitución ilustrada de la República bolivariana de Venezuela se divise en deux parties. Dans la première, les auteurs nous présentent les personnages principaux de la bande dessinée. Parmi ceux-ci, nous retrouvons les figures emblématiques de l’histoire nationale, tels que Simón Bolívar, Francisco de Miranda ou bien encore José Antonio de Sucre. Nous en découvrons aussi de nouvelles comme Pedro Camejo et la Negra Hipólita. La présence de ces protagonistes d’origine africaine subsaharienne aux côtés des héros traditionnels de l’histoire vénézuélienne est révélatrice du but recherché. Elle permet au gouvernement de reconsidérer les cadres de la mémoire collective en y incorporant l’élément africain jusqu’alors relégué à un second plan par l’historiographie. L’objectif est clair : en faire des modèles identitaires auxquels les Afro-descendants pourront facilement s’identifier. Ainsi, sur le dessin, Pedro Camejo apparaît vêtu d’un uniforme rouge d’officier, teint bistre, coiffé d’un bandeau entourant des cheveux noirs crépus, montant à cheval, sabre en main et luttant contre des militaires espagnols. Quant au texte, il le présente comme un ancien esclave connu sous le pseudonyme de Negro Primero. Il est également souligné que cet Afro-vénézuélien, devenu lieutenant sous les ordres de José Antonio Páez, décède lors de la bataille de Carabobo qui scelle l’indépendance du pays. Cette présentation tend bien à élever Pedro Camejo au rang de héros national qui n’hésite pas à offrir sa vie pour affranchir le Venezuela de la tutelle espagnole et instaurer la République. Pour ce qui est de la Negra Hipólita, le texte la présente également comme une ancienne esclave. Nourrice de Simón Bolívar, elle devient sa « mère noire » à la mort de ses parents, le chérit durant toute son enfance (Bolívar, S/d: 164) et lui transmet une partie de sa culture africaine. Ce lien filial qui l’unit au Libertador, symbole de l’identité nationale et Père de la patrie, l’associe directement à la création du Venezuela et fait donc d’elle une héroïne nationale.

La seconde partie de l’ouvrage est entièrement consacrée au texte constitutionnel. Nous n’étudierons pas ici les vignettes dans lesquelles apparaissent les deux personnages. Nous soulignerons simplement que presque toutes se rapportent aux articles relatifs à la participation citoyenne et aux droits qu’octroie la Constitution aux Vénézuéliens(24). Ce choix n’est pas anodin. Il vise à favoriser l’identification des membres de la communauté noire avec leurs ancêtres afin de les inciter à s’investir, à leur tour, dans la vie de la nation. En s’intéressant et en participant aux affaires publiques, ils pourront eux-mêmes impulser les changements auxquels ils aspirent et deviendront ainsi les protagonistes de cette société nouvelle qu’entend construire la révolution bolivarienne.

Une méthode similaire est utilisée en 2007 à l’occasion de la publication du projet de réforme constitutionnelle. Dans cet ouvrage, nous retrouvons Pedro Camejo et la Negra Hipólita, mais aussi d’autres figures historiques de la communauté noire, comme l’esclave Miguel del Barrio, son épouse Guiomar, José Leonardo Chirino et la Negra Matea.

 

Conclusion

Suite à son implantation forcée au Venezuela, la communauté noire a connu l’esclavage, l’exploitation, les guerres et l’exclusion. Contre leur gré, ses membres ont participé à la colonisation du pays, à son développement économique et joué un rôle essentiel dans la guerre d’indépendance. Malgré tous ces sacrifices, ils n’ont obtenu que peu de reconnaissance de la part des autorités qui se sont succédé au pouvoir depuis l’époque coloniale. Il leur aura fallu attendre la fin du XXe siècle pour enfin entrevoir des changements. En effet, depuis l’accession au pouvoir d’Hugo Chávez, nous assistons à une tentative de mise en place d’une politique de revalorisation de l’image des Afro-descendants. Celle-ci passe par une sorte de sacralisation de quelques personnalités issues de cette communauté dont les actes ont marqué la vie de la nation. Cette stratégie tend à encourager l’intégration des Vénézuéliens d’origine africaine dans le processus de mise en place d’une démocratie participative. Reste à savoir si toutes ces initiatives réussiront à mobiliser les Afro-vénézuéliens afin que, conjointement avec les autres membres de la société, ils deviennent les authentiques protagonistes de la vie politique, économique, sociale et culturelle de la nation. Il faudra également rester vigilant à ce que cette politique ne soit pas conduite de façon excessive et génère, comme par le passé, des tensions intercommunautaires susceptibles d’engendrer d’éventuels conflits ethniques.

 

Notes de bas de page


(1) La Red de Organizaciones Afrodescendientes (ROA) et la Red Afrodescendientes de Venezuela (RAV).

(2) Ladinos : Africains qui parlent espagnol et qui possèdent déjà une certaine culture européenne.

(3) L’île de Cubagua est située dans le golfe de Paria, plus précisément entre l’île de Margarita et la ville de Cumaná.

(4) Le 15 février 1531, ces droits sont transférés aux frères Antonio et Bartolomé Welser, des banquiers allemands originaires d’Augsbourg, qui administreront le Venezuela jusqu’en 1546 (Humbert, 1905: 5, 13, 83).

(5) Ville située dans l’actuel État de Yaracuy.

(6) La Compagnie royale de Cacheu (Portugal), la Compagnie de Guinée (France), la Compagnie royale d’Angleterre Mers du Sud et la Compagnie Guipuzcoana (Espagne).

(7) Selon Federico Brito Figueroa, 13.100 arrivent au Venezuela au XVIe siècle, 35.212 au XVIIe siècle et 70.513 au XVIIIe siècle.

(8)Mulato, mélange de blanc et de noir ; zambo de noir et d’indigène ; zambo prieto, de Noir et de zambo ; cuarterón, de blanc et de mulato ; quinterón, de blanc et de cuarterón et salto atrás quand le fruit de l’union est de couleur de peau plus foncée que celle de ses géniteurs. Avec le temps, toutes ces catégories se regroupent sous l’appellation de Pardos.

(9) Certaines d’entre elles comptent plus de deux cents membres dont des Noirs établis au Venezuela, des esclaves ayant fui les îles caribéennes adjacentes (Curaçao, Martinique, Guadeloupe, Grenade, Sainte Lucie, etc.), mais aussi des indigènes (Acosta Saignes, 1978:  198-199).

(10) Nom espagnol pour désigner les esclaves en fuite.

(11) Au XVIIe siècle, selon José de Olavarradia, ils sont à peu près 20.000 et au XVIIIe siècle, Miguel Acosta Saignes estiment leur nombre à 30.000 (Acosta Saignes, 1978:  198).

(12) Disposition testamentaire, en récompense des bons et loyaux services, par lien de filiation, âge avancé, dénonciations de révoltes, en échange d’argent, etc. (Tardieu, 1984: 237-257).

(13) Sur un total de 898.043 habitants, on dénombre 172.727 Blancs (20,3% de la population), dont 12 000 espagnols péninsulaires (1,3%), 407 000 Noirs ou assimilés (45%), 33 362 Noirs libres (4%), 87 800 Noirs esclaves (9,7%), 24 000 nègres marrons (2,6%) et 151 954 Indigènes (18,4%). (Brito Figueroa, 1979: 160)

(14) José Marcial Ramos Guédez, dans son ouvrage intitulé Contribución a la historia de la culturas negras en Venezuela colonial, récence toutes les rébellions depuis 1525 jusqu’à 1799. (Ramos Guédez, 2001: 161-164)

(15) Grand propriétaire terrien de race blanche né en Amérique.

(16) Propriétés confisquées à l’ennemi et qui passent sous la tutelle administrative de l’État.

(17) Selon le texte constitutionnel, il existe deux catégories de citoyens : les passifs et les actifs. Seuls les seconds jouissent du droit de vote. Pour y prétendre, il faut être vénézuélien, résider dans le pays, être marié, ou majeur de vingt et un ans, savoir lire et écrire et posséder une propriété d’une valeur de cinq cents pesos, ou, à défaut, avoir un métier d’utilité publique, ou avoir un grade dans l’armée, ou encore une rente de trois cents pesos par an. (República bolivariana de Venezuela-Asamblea Nacional, 2003: 41).

(18) Le premier obtient le grade de colonel et le second celui de lieutenant.

(19) L’ordre des Libertadores. Récompense instituée par Simón Bolívar le 22 octobre 1813 pour récompenser les soldats qui prirent part à la campagne admirable.

(20) Fusion du Venezuela et de la Nouvelle-grenade le 17 décembre 1819.

(21) Constitution de 1864, Título III, artículo 14.

(22) Aristóbulo Istúriz, William Lara, Luis Reyes Reyes, Modesto Ruiz, etc.

(23) Entretien informel avec Carlos Lugo, directeur de la radio communautaire Negro Primero.

(24) Articles 21,51, 67, 76, 79, 90, 92, 123, 184, 187, 274, 293, 347.

 

 

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Pour citer cet article:

Folz Olivier, « La communauté noire au Venezuela: de l'esclavage à la reconnaissance culturelle », RITA, N°5:  décembre 2012, Mis en ligne le 15 décembre 2011. Disponible en ligne: http://www.revue-rita.com/traits-dunion98/la-communaute-noire-au-venezuela-de-lesclavage-a-la-reconnaissance-culturelle.html