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Aux sources de la civilisation : Les jeunes élites brésiliennes et le voyage en Europe dans la seconde moitié du XIXème siècle (1850-1914)

Le XIXe siècle, qui voit les anciennes colonies d’Amérique latine prendre leur indépendance, n’est pas pour autant le moment, pour celles-ci, d’un divorce avec l’Europe, mais plutôt celui d’une focalisation sur d’autres centres européens qui jouent, dans le cadre d’une dialectique de civilisation / barbarie,  le rôle, pour l’Amérique latine, de métropole de substitution : Paris et Londres....

Dans ce contexte, et également dans la mesure où les progrès techniques  rendent le voyage plus rapide et aisé, le voyage de formation en Europe devient un passage obligé de la formation des jeunes élites brésiliennes et concourt à valider le statut d’élites nationales de ceux qui en reviennent. La préparation de ce voyage est une étape constitutive à part entière de celui-ci. Elle suppose un séjour de plusieurs années dans la capitale, l’acquisition, pour les élites régionales, d’un statut national, et l’accès aux réseaux sociaux de l’élite nationale. Si ce capital social est utile au voyage, il dépasse largement cet usage premier et induit une dynamique de mise en réseau des élites nationales brésiliennes.

Mots clés : Elites ; Brésil ; Europe ; Voyage ; Formation.

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Etienne Sauthier

Doctorat en Histoire
Université Paris 3 - IHEAL

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Aux sources de la civilisation : Les jeunes élites brésiliennes et le voyage en Europe dans la seconde moitié du XIXème siècle (1850-1914)

 

Introduction

          Le XIXe siècle est, pour tout le continent latino-américain, un temps de jeunesse. En effet, c’est suite aux guerres napoléoniennes que la plus grande partie des anciennes colonies prend son indépendance. Si le Brésil la connaît plus tard, en 1822, il n’en est pas moins, tout au long du siècle, une jeune nation en proie à de nombreuses mutations et de nombreux changements politiques. Pour ces nouveaux États, l’indépendance vis-à-vis de l’ancienne métropole n’est toutefois pas une rupture avec l’Europe mais tout au plus une focalisation relative de ceux-ci et de leurs élites sur d’autres pôles d’attraction européens. François-Xavier Guerra souligne ainsi, que Paris est devenue au XIXe siècle une métropole de substitution pour les élites latino-américaines (Guerra, 1989), remarquant par ailleurs que s’il s’agit bien souvent d’élites sociales, il s’agit toujours d’élites culturelles. Il n’est ainsi pas innocent, en vertu de cette proximité avec l’Europe, que ce soit en 1889, l’année du centenaire de la Révolution française, et au chant de la marseillaise, que l’Empereur du Brésil, Pedro II, a été renversé. Maris-Sylvanie Veillard souligne par ailleurs, dans son article « Aspects de la présence culturelle française à Rio de Janeiro » (2003) cette forte présence de Paris et de ses produits dans le Rio de la seconde moitié du XIXème siècle.

Jeffrey Needell, dans son ouvrage A Tropical « Belle Epoque », remarque également cette proximité entre Rio, Londres et Paris, en remarquant qu’à la Belle Epoque : « la civilisation se résumait, pour les Brésiliens, à la France et à l’Angleterre » (1987, p.28), dans un Brésil qui, comme ses voisins, vit ses rapports avec l’Europe en termes de dichotomie entre centre et périphérie, civilisation et barbarie.

La conjonction de cette proximité avec une Europe idéalisée et les progrès techniques du XIXe siècle (navigation à vapeur, lignes régulières entre l’Europe et l’Amérique du sud, etc…) fait que le voyage de formation en Europe devient le passage obligé de tout jeune membre de l’élite brésilienne en formation. C’est ainsi par le biais de la dimension cosmopolite et « civilisée » qu’apporte ce séjour que ces élites trouvent leur légitimité ; mais pour accéder à ce voyage, il faut être à même de pouvoir se l’offrir et ce à plusieurs niveaux : tout d’abord au niveau financier mais aussi au niveau social. En effet, si la navigation à vapeur permet d’établir, au XIXe siècle, des lignes régulières entre l’Amérique du Sud et l’Europe, le voyage, qui devient par ailleurs plus sûr n’en reste pas pour autant moins onéreux. C’est d’autant plus vrai que le séjour en Europe constituant souvent un tour d’Europe, plus ou moins important, selon les moyens des voyageurs, (dans la plus pure tradition du voyage de formation des élites britanniques), ceux-ci doivent également voyager et se loger au cours de ce voyage. Le voyage en Europe représente donc au final, en cumulant coûts de la traversée, coûts des voyages internes au continent européen, coûts des divers logements occupés durant ce séjour et coûts des loisirs : (théâtres, restaurants, cafés, cabarets, etc.), une somme considérable dont seuls les membres de l’élite sociale, au pouvoir acquisitif élevé, peuvent disposer.

L’étude du moment de formation qu’est le voyage en Europe et de ses modalités se fera en trois temps. On pourra tout d’abord s’interroger sur le moment de préparation, avant le départ (qu’il s’agisse de se financer ou de se faire des connaissances et un réseau social de Brésiliens installés en Europe). On s’intéressera ensuite au voyage et au séjour proprement dit, aux rencontres et à la constitution, en Europe, d’un carnet d’adresses. Enfin, on verra quels fruits ces jeunes élites retirent de leur voyage et de quelle manière elles sont définitivement légitimées à travers le capital social qu’elles y acquièrent.

Il est cependant essentiel de toujours avoir en vue, comme préalable, la proportion réduite du groupe concerné. Comme on pourra le voir, l’élite qui voyage en Europe est une élite nationale issue, sauf exceptions, de la capitale. On peut dire que cette « crème » de la société brésilienne est passée par deux tamis consécutifs : le régional et le national.

L’article « Les inégalités socioculturelles au Brésil à la fin du XIXème siècle : Salvador de Bahia vers 1890 » (1999) de Katia de Queirós Mattoso permet de se faire une idée relativement précise de la proportion, en province, de l’élite régionale dont est issue l’élite carioca. Celui-ci nous montre en effet, en s’appuyant sur l’exemple de Salvador de Bahia, que la haute élite d’une importante ville de province représente 6% de la population et 70 % des ressources de la ville. Si cette élite est immensément riche, par rapport au niveau du reste de la ville, elle n’en est pas moins réduite : d’autant plus qu’il faut également garder à l’esprit que sur les 6% de personnes qui la constituent, seule une partie va acquérir le statut d’élite nationale à Rio de Janeiro. La notion d’élite est ici à entendre dans deux sens possibles : on peut tout d’abord parler d’élites sociales dont la fortune provient bien souvent de propriétés terriennes, jusqu’à la fin de la période impériale en tout cas. On peut voir un exemple de ces premières élites dans la personne de Joaquim Nabuco, fils d’un important dignitaire de l’Empire du Brésil, issu d’une famille de propriétaires terriens du Nordeste et qui fait son premier voyage en Europe grâce au produit de la vente d’un engenho (propriété sucrière) dont il hérite. On peut également envisager le terme d’élite à propos d’élites culturelles : on parle ici de jeunes gens qui ont eu l’occasion de se former dans leurs états respectifs avant de rejoindre Rio de Janeiro, afin de poursuivre leur formation, que ce soit au Collège Pedro II, à l’Ecole Militaire, à l’Ecole polytechnique ou dans l’un des grands instituts de la capitale. Nombre de ces membres de ce que l’on peut appeler l’élite culturelle se sont formés dans une des prestigieuses facultés de droit de Recife ou de São Paulo avant de rejoindre la capitale pour y commencer leur carrière.

 

I. Un voyage à préparer

          Le voyage en Europe, et en particulier à Paris, étant le dernier moment dans la formation de l’élite brésilienne, on peut dire qu’il couronne celle-ci, à l’époque impériale comme durant la Republica Velha. Ces années d’éducation et de jeunesse sont ainsi orientées vers un certain nombre d’étapes nécessaires : deux de ses étapes sont l’installation durant quelques années dans la capitale brésilienne, qui a pour fonction d’ériger les élites régionales au rang d’élites nationales, et le voyage en Europe qui donne à ces élites en devenir un prestige qui les consacre définitivement. Le voyage européen ainsi institutionnalisé n’est pas un voyage qui se fait à la légère : c’est un voyage de formation, largement pensé et mûri qui se prépare longtemps à l’avance, d’autant plus que dans les familles de l’élite, ce voyage, effectué de père en fils, répond à une tradition familiale. On peut citer l’exemple de la famille Rio Branco où le père comme le fils effectuent ce voyage avant le début de leur carrière. Le cas du diplomate, écrivain et intellectuel Graça Aranha est également emblématique de cet état de fait. Celui-ci fait son premier voyage en Europe grâce à l’aide de son ami Joaquim Nabuco qui l’adjoint à la mission diplomatique sur les frontières du Brésil et de la Guyane britannique en 1897. En 1913, lors d’un retour en Europe de celui-ci, il en profite pour emmener son fils Themistocle da Graça Aranha terminer ses études de droit à la Sorbonne et profiter ainsi d’une dernière année de formation et de vie à Paris. S’il a pour enjeu la découverte d’une « métropole culturelle », une remontée aux sources de la « civilisation », le voyage en Europe a aussi pour but de s’y constituer un carnet d’adresse, de connaître et fréquenter ce monde dont l’élite brésilienne se sent issue et de pouvoir attester de ce nouveau capital social au retour. Il est nécessaire, cependant, avant même le voyage, de se construire un capital de légitimité à même de permettre ce voyage. C’est en ce sens que le voyage en Europe part souvent de Rio, où le futur voyageur aura eu le loisir d’acquérir les moyens financiers et de bâtir le capital social nécessaire à son séjour. On entend ici le terme de capital social au sens où le définit Pierre Bourdieu dans son article « The forms of capital », comme un :

« Agrégat des ressources réelles ou potentielles qui sont liées à la possession d'un réseau durable de plus ou moins de rapports institutionnalisés liés à la connaissance et à l’identification mutuelle. »(1) (Bourdieu, 1986).

L’élite de la capitale peut en ce sens être perçue comme une institution, ce capital assure une légitimité en tant qu’élite et un certain poids social à ceux qui l’acquièrent. La capitale est ainsi, au sens propre comme figuré, une passerelle vers l’Europe. La construction de ce capital légitimant préalable va se faire, comme on pourra le voir, de diverses manières.

Il existe tout d’abord, depuis la période impériale, une politique de bourses nationales visant à favoriser le voyage. Ainsi l’article d’Ana Paula Cavalcanti Simioni « Le voyage à Paris : L’académie Julian et la formation des artistes peintres brésiliennes vers 1900 » (2004-2005) signale que, dès 1844, un prix de voyage est institué à l’Academia Imperial de Belas Artes, visant à envoyer ses étudiants les plus méritants continuer leur formation, d’abord à Rome, puis, de plus en plus, à Paris. Lyra Tavares signale également que les archives diplomatiques de l’Itamaraty font état de démarches d’inscription faites par l’Etat Brésilien auprès de prestigieuses écoles françaises pour des boursiers brésiliens qui terminent leurs études en Europe : l’Ecole militaire, les Ponts et Chaussées, les Mines, l’Institut de Géographie, les Ecoles d’Architecture, les Arsenaux de construction et le Conservatoire des Arts et Métiers (1979, p.170-172). Dans les milieux intellectuel et journalistique, ce sont les contacts et les moyens de se mettre en valeur qui vont donner aux voyageurs les moyens de partir. L’Etat a cependant les moyens de favoriser leur voyage, et en particulier le Ministère des Relations Extérieures, ce dernier dispose de bon nombre de postes de secrétaires d’ambassade dont l’utilité essentielle est de placer ces jeunes voyageurs, comme le montre le travail de Pauline Raquillet sur les milieux diplomatiques latino-américains de Paris (1993).

Le cas du journaliste et diplomate Gilberto Amado est édifiant en ce sens. Dans son livre, Moçidade no Rio de Janeiro e primeira viagem à Europa(2), l’auteur, qui part pour l’Europe en 1912, évoque son voyage mais également les années qui précèdent celui-ci : celles de son séjour carioca. Arrivé en 1910 de son Nordeste natal, après sa formation de droit à Recife et grâce aux amitiés politiques de sa famille, il a l’occasion de connaître les milieux journalistiques où il se fait des amis et publie des chroniques régulières dans le journal O Pais notamment. En 1912, après s’être fait remarquer grâce à nombreux articles, et en particulier un éloge du nouveau Ministre des Relations Extérieures, Lauro Muller, Gilberto Amado bénéficie d’une occasion très intéressante pour partir en Europe. L’Itamaraty propose en effet à celui-ci un poste de secrétaire à l’ambassade de Paris, lui offrant à la fois les moyens matériels et les réseaux sociaux nécessaires à son voyage. C’est clairement tout le séjour qu’il fait à Rio de Janeiro entre 1910 et 1912 qui est orienté vers ce voyage en Europe : qu’il s’agisse des rencontres qu’il fait, des ressources qu’il conquiert ou des réseaux qu’il crée. La longue préparation de ce voyage et son long mûrissement font que Gilberto Amado peut dire : « S’agissant de Paris, je n’allais pas le voir mais le vérifier.»(3).

Les journaux brésiliens financent d’ailleurs eux-mêmes certains voyageurs. Comme le montre Antonio Dimas, dans son ouvrage Bilac, o jornalista [Dimas, 2006, p. 23], c’est en tant que correspondant du journal A cidade do Rio que le journaliste et poète Olavo Bilac part pour la première fois en Europe. Le poète Nestor Victor, quant à lui, bien que correspondant pour O Paiz et O Correio Paulistano, voyage aussi comme  professeur de portugais des enfants du Baron do Rio Branco. Ministre brésilien des Relations Extérieures de 1902 à sa mort, en 1912. Celui-ci offre ainsi à Nestor Victor un financement de son voyage (1902-1905), conjointement à ses missions de correspondants. Il lui offre également son soutien dans la société parisienne et l’accès à ses réseaux.

Cette fonction de parrain est essentielle : elle désigne l’introducteur, celui qui va présenter le voyageur dans la société européenne et avec lequel le voyageur a tout intérêt à être en contact avant même son voyage. Dans la première partie de la période, de 1850 à 1890 environ, les Brésiliens qui voyagent à Paris se servent particulièrement de personnalités qui ont un lien très fort avec le Brésil et une situation importante dans le monde parisien. Ferdinand Denis est l’un de ces passeurs : en plus d’avoir laissé une trace écrite importante, il a assuré l’entrée de nombreux membres de la haute élite brésilienne et de leurs écrits en France. Parti au Brésil à 21 ans, en 1819, Ferdinand Denis y passe sa jeunesse et a, lors de son séjour au Brésil, le temps de se lier à toute la haute élite de Rio de Janeiro. Après son retour, il devient, en 1841, conservateur de la Bibliothèque Sainte-Geneviève à Paris, dont il deviendra administrateur quelques années plus tard. Il garde des liens très étroits avec l’élite impériale brésilienne dont il est, pour ainsi dire, le relais. La lettre d’Henrique de Beaurepaire Rohan, intellectuel et écrivain brésilien, adressée à Ferdinand Denis le 25 mars 1861(4) remercie celui-ci d’avoir bien voulu faire ajouter son ouvrage à la nouvelle biographie (sic !) des éditions Didot. On le voit, ce personnage, écrivant depuis sa bibliothèque au centre de Paris a, grâce à son vécu, à sa connaissance du Brésil et à sa situation dans la société parisienne, une position de passeur et de parrain ; les élites brésiliennes qui font le voyage de Paris ont donc tout intérêt à le connaître avant même leur départ.

José Maria Eça de Queiros, lui aussi, a une situation qui lui permet de jouer l’intermédiaire entre Paris et le monde luso-brésilien. Auteur lusophone très reconnu et souvent comparé au « Flaubert portugais », il bénéficie d’un grand succès au Brésil. En 1888, celui-ci devient consul portugais à Paris, où il vit jusqu’à sa mort, en 1900. Le lien culturel lusophone, la reconnaissance et la situation à Paris d’Eça de Queiros ne pouvaient que faire de lui un « passeur » culturel, un parrain pour l’élite intellectuelle brésilienne de la fin du XIXème. L’existence de ces sociabilités lusophones à Paris à la fin du XIXème siècle est d’autant plus importante qu’elle se situe à un moment où, de l’aveu même de l’homme politique et diplomate Joaquim Nabuco, rapporté dans l’ouvrage de Lyra Tavares : « Il y a assez d’intellectuels, d’écrivains et de membres de l’élite brésilienne à Paris pour y fonder une Académie brésilienne de lettres » (1979, p.247). De ce point de vue, les nouveaux arrivés ont tout intérêt à avoir des liens relativement étroits avec ceux qui sont déjà en Europe et pourront également les y introduire, cette dynamique de parrainage évolue ainsi au fil de la période en cercle vertueux.

Dans la correspondance de Joaquim Nabuco et de son cousin, Sancho de Barros Pimentel, on constate ainsi dans une lettre envoyée à Nabuco, alors que celui-ci n’a pas encore quitté le Brésil pour son premier voyage en Europe, le 1er avril 1873(5), qu’il avait déjà enclenché son réseau brésilien à Paris afin d’obtenir une rencontre, lors de son voyage, avec Renan qu’il admire beaucoup. Sancho de Barros Pimentel lui demande si le Baron de Penedo, qu’il appelle par son nom de famille, Moreira, mais qui est un correspondant très fréquent de Joaquim Nabuco, lui a obtenu de Renan la promesse qu’il le rencontrerait. Penedo est évidemment un atout social important dans la mesure où celui-ci, à ce moment diplomate en Grande-Bretagne, vient d’être le premier représentant du « nouveau monde » à recevoir le titre de Docteur honoris causa de l’Université d’Oxford et est très reconnu dans les milieux d’élite européens.

C’est de cette manière qu’il faut lire le séjour à Rio de Janeiro de la majorité des jeunes membres de l’élite amenés à partir par la suite en Europe : comme un moment à part entière de leur formation, dans le prolongement duquel se situe le voyage en Europe qui reste un passage obligé pour quelqu’un qui prétend au statut d’élite. Ces deux étapes sont essentielles dans la formation de ces élites brésiliennes et leur reconnaissance définitive, à leur retour.

II. La vie parisienne

          Un des enjeux fondamentaux du voyage en Europe des jeunes Brésiliens est de leur permettre de se constituer un carnet d’adresse et de fréquenter le meilleur possible, socialement, intellectuellement et culturellement parlant, de la « métropole de substitution » qu’est Paris. Le voyage en Europe est un moment qui sert, à travers le capital social qui y est acquis, à donner aux Brésiliens qui le font, l’élément de cosmopolitisme et la teinte internationale qui légitiment leur statut d’élites au Brésil. Il faut dire, par ailleurs, que dans une société parisienne où les classes socialement et culturellement dominantes se connaissent et se fréquentent, le fait de côtoyer un nombre au final relativement restreint de leurs membres, donne accès, par le biais des salons et autres sociabilités, à des réseaux sociaux nettement plus étendus. Le cas de Luis Gastão d’Escragnolle Doria est une parfaite illustration de cette dynamique. En effet, on peut compter, parmi les correspondants de ce rédacteur des débats du Sénat brésilien et professeur d’Histoire au Collège Pedro II, dont la correspondance est aux Archives nationales brésiliennes (site de Rio), un grand nombre de membres des mondes littéraire, politique et intellectuel français. Parmi ceux-ci, le Cardinal Richard, archevêque de Paris, les frères Goncourt, Emile Massenet, Pierre Loti, le poète Maurice Rollinat, Jules Verne, François Coppée, Alexandre Bisson, Guy de Maupassant, Stéphane Mallarmé, Camille Saint-Saëns, Maurice Maeterlinck ainsi que Paul et Victor Marguerite, ce qui représente, pour un seul voyageur un panthéon conséquent. Cependant, ce qui est intéressant à voir, c’est que l’on peut facilement regrouper une bonne partie de ces auteurs et intellectuels par cercles de connaissances. Ainsi en croisant les connaissances et correspondants de Luis Gastão d’Escragnolle Doria, on constate que bon nombre d’entre eux ont en commun le fait de faire partie du petit cercle d’amis intimes que Maurice Maeterlinck et son épouse, Georgette Leblanc ont tendance à recevoir chez eux. On peut ainsi se demander si le cercle social, le carnet d’adresse que ramène Luis Gastão d’Escragnolle Doria, au retour de ses multiples voyages à Paris, peut correspondre à celui de de Maeterlinck.

Nestor Victor, quant à lui, bien qu’il recouvre dans son livre Paris, impressões de um brasileiro(6), ses amitiés d’un voile modeste : « j’ai gardé quelques amis à Paris », fréquente de manière certaine, lui aussi, le cénacle de Maeterlinck. L’article d’Antonio Carlos Santos : « Paris, mito e declínio / Nova York, o século do futuro » (2006), s’il ne le dit explicitement ne laisse aucun doute concernant ses liaisons avec Maeterlinck et on constate, par ailleurs, que nombre des artistes et intellectuels dont il parle sont aussi des gens qui ont fréquenté ce salon.

On constate que ce capital social acquis en Europe et la vaste connaissance de l’Europe qui en découlent peuvent donner à certains Brésiliens une vocation de passeur, de trait d’union entre le Brésil et l’Europe, au niveau culturel, mais aussi au niveau économique : on peut, par exemple rapprocher la démarche d’Affonso Arinos de Mello Franco de cette dynamique. En 1909, cet intellectuel et homme d’affaire brésilien fonde, avec un certain nombre de Brésiliens bien installés en Europe la « Brazil Exterior Limited », qui a son siège à Londres et une antenne à Paris. Le but de cette société est d’aider les entreprises brésiliennes à constituer des dossiers en vue de recherche d’investissements européens au Brésil(7). Il est cependant important de remarquer que le voyage en Europe n’est pas uniquement, pour les voyageurs brésiliens, l’occasion de rencontres transatlantiques, mais que l’élite brésilienne se fréquente et se rencontre aussi elle-même à Paris. Nestor Victor le souligne au chapitre V de son livre : « O conforto em Paris », lorsqu’il parle du café Parisien, où s’est tramée toute l’histoire politique du Brésil impérial, du mouvement abolitionniste aux rencontres entre positivistes et au renversement de Pedro II. Une grande partie du milieu monarchiste en exil se retire en France et notamment à Paris. Beaucoup de membres des milieux littéraire et intellectuel luso-brésilien, de passage à Paris, fréquentent, comme le montre Mario Carelli, le salon d’Eduardo Prado (1993) : le poète, monarchiste convaincu et virulent polémiste s’installe à Paris après la chute de l’Empire. Il reçoit chez lui ses amis, les plus grands noms de la littérature portugaise et brésilienne du moment : Eça de Queiros (qui  rencontre chez lui Olavo Bilac, lors du premier voyage à Paris de ce dernier), Ramalho Ortigão, Oliveira Martins, Afonso Arinos et le baron de Rio Branco entre autres. On peut ainsi dire que le capital social constitué en Europe est d’une importance cruciale pour les voyageurs et pour la formation des jeunes élites brésiliennes. Multiforme, légitimant et enrichissant pour ceux-ci, il permet de constituer un carnet d’adresse transatlantique, mais aussi un carnet d’adresse constitué d’élites brésiliennes rencontrées en Europe. La constitution de ce capital social demande un certain nombre de démarches aux voyageurs, avant et pendant leur voyage, il tend également, comme tout réseau social, à s’élargir de manière exponentielle.

Une fois rentrés, les voyageurs ont tout intérêt à rendre public ce capital social, à faire savoir qui ils connaissent. Qu’il s’agisse, pour eux de l’utiliser comme un vernis de prestige au Brésil ou comme un système utile de liens sociaux, le voyage européen tendra de toute manière toujours à consacrer ceux qui l’ont fait et à leur donner une légitimité définitive en tant qu’élites, que ça soit à travers leur réseau de connaissances en Europe, amplement médiatisé, ou grâce à l’expérience qu’ils ont eu d’un idéal européen vers lequel le Brésil est tourné tout au long du XIXe siècle. Dans la mesure où elles sont perçues comme s’étant civilisées à travers le contact européen, ces jeunes élites, une fois de retour de leur voyage, seront à même de civiliser un Brésil perçu comme barbare dans son rapport à l’Europe, ou du moins en cours de civilisation. On peut percevoir cette dialectique de civilisation dans le rapport qu’entretiennent avec l’Europe et avec la France en particulier les élites intellectuelles brésiliennes de la fin du XIXe siècle dans ces quelques vers tirés de L’Option, pièce de théâtre de Joaquim Nabuco.

Si la France mourait, ce serait comme Athènes.

On sentirait sans cesse, au fond de l’âme humaine,

Le remous éternel de son dernier élan.

La lune éteinte aussi soulève l’Océan.(8)

On voit également que ce discours de civilisation et de barbarie est traitée avec ironie par l’écrivain brésilien Lima Barreto dans Recordações do Escrivão Isaías Caminha :

- En Europe, celui qui fait des études a des débouchés. Il sait parfaitement où il va ; ici…

- Comment ! Monsieur, il n’y a rien comme votre pays ! A une seule condition : il faut, quand on arrive, pendre au Pain de Sucre son habit de gentilhomme ; à part cela, tout va comme sur des roulettes ».(9)

Dans ces conditions il semble naturel que le voyage en Europe, ait, pour les élites brésiliennes en devenir, une fonction légitimante, et constitue une partie intégrante de leur formation.

 

III. Retour et consécration

          L’Europe est, comme on a pu le voir, à bien des niveaux un espace légitimant pour les élites latino-américaines, elle l’est d’ailleurs restée à un certain égard, comme en atteste le prestige, en Amérique latine du nom de la Sorbonne, aujourd’hui encore. C’est pourquoi, si on peut voir le voyage européen, certes, au sens propre, comme éducateur, ce qui l’inscrit dans la tradition britannique du voyage de formation, il est également un voyage transformateur en ce qu’il change ceux qui le font et la perception que peut avoir d’eux la société brésilienne. Dans la dialectique du centre et de la périphérie, qui est celle des élites latino-américaines du XIXe siècle vis-à-vis de l’Europe, c’est à la recherche d’un idéal de civilisation qu’on part en voyage de formation en Europe. Il est compréhensible, en ce sens, que les Brésiliens adoptent en Europe un mode de vie européen et s’intègrent parfaitement aux sociétés dans lesquelles ils séjournent. Nestor Victor signale que lors de leur séjour en Europe, les Brésiliens se découvrent autres que ce qu’ils sont.

Il faut être allé en Europe pour voir quelles parts insoupçonnées de notre être se révèlent là-bas, qualités et défauts que nous ne percevions même pas en vivant dans notre propre milieu(10).

Dans son ouvrage, Companheiros de Viagem(11), l’écrivain Alceu Amoroso Lima, dresse une galerie de portrait de ceux qu’il a croisés et qui l’ont touché. Parmi eux, bon nombre de Brésiliens qui ont adopté, en Europe, le mode de vie européen et qui en ont été radicalement transformés. L’auteur cite Afonso Arinos, très profondément lié au poète Eduardo Prado, dont il a épousé la nièce. Cet auteur construit sa carrière intellectuelle et littéraire dans les salons de Paris et de São Paulo. Comme Eduardo Prado, une fois la monarchie brésilienne à terre, et face à l’impossibilité de sa restauration, celui-ci se retire de la vie publique et quitte le pays pour Paris où il s’installe ; s’il vit à Paris comme un déraciné au sens barrésien du terme, il n’en garde pas moins, à chaque retour au Brésil, une profonde nostalgie de l’Europe et de Paris en particulier.

«  Nostalgie de la patrie en Europe, nostalgie de l’intelligence au Brésil, […] d’une portion des quais de Seine à l’ombre du vieux Louvre . »

Alceu Amoroso Lima évoque également, dans le même ouvrage, le cénacle brésilien dont il a fait partie à Paris. Ce groupe de jeunes gens y est animé, par le père de l’un d’eux : l’écrivain Graça Aranha. Cet auteur est un des traits d’union entre une ancienne génération littéraire dont il fait partie et la jeunesse littéraire qui fera florès dès 1922. Le fils de Graça Aranha, Themistocle de Graça Aranha, fait ses études de droit à Paris en même temps qu’Alceu Amoroso Lima. De 1913 à 1914, moment où ils rentrent au Brésil, au début de la première guerre mondiale, les deux jeunes gens vivent une année proustienne dans le Paris de la Belle Epoque, sous les auspices d’Aranha. Alceu Amoroso Lima évoque la haute élite parisienne et ses jeunes filles que les deux jeunes gens fréquentent à l’hôtel Majestic « comme Proust les fréquente sur les plages de Balbec » (1971, p.101). Dans l’appartement de Graça Aranha, à la rue de la Tremoille, ils fréquentent tout un ensemble de jeunes auteurs que Graça Aranha rassemble dans le groupe « dinamista » : Octavo Filho, Alvaro Moreira, Afonso Arinos, Ronald de Carvalho et Felipe d’Oliveira, pour la plupart futurs modernistes. Il est évident que ces jeunes gens, à leur retour au Brésil, seront riches de cette année de vie européenne qui les aura transformés. Il est intéressant de constater que ce rassemblement, à Paris, de jeunes élites, entre 1913 et 1914, intègre bon nombre de membres de la future génération moderniste.

L’écrivain et journaliste Olavo Bilac part, quant à lui, pour son premier voyage à Paris en 1890. Le temps qu’il passe en Europe le rend très critique à l’égard du Brésil, notamment dans sa correspondance avec Max Fleiuss (Dimas, 2006, p.26). Jugeant le Rio de son retour à l’aune du Paris qu’il vient de découvrir, le regard d’Olavo Bilac sur sa capitale n’en est que plus sévère. C’est en raison des articles qu’il écrit dans ce sens, de ses voyages et de sa connaissance de l’Europe que l’auteur est associé à la commission de réforme urbanistique de Rio de Janeiro. C’est ainsi à travers leur reconnaissance européenne que la majorité des intellectuels et écrivains brésiliens sont reconnus au Brésil. Des artistes comme Eduardo Prado, Olavo Bilac ou même Nestor Victor le démontrent. En effet, c’est le fait qu’ils aient été publiés à Paris, qu’ils aient voyagé en Europe et qu’ils aient à leur actif des écrits sur ce voyage qui a donné un essor à leur carrière littéraire au Brésil. De la même manière, si Graça Aranha entre sans oeuvre à l’Académie brésilienne de lettres, c’est au moment de la publication à Paris de son premier roman, Canaã, en 1902, que celui-ci obtient une reconnaissance pleine et entière au Brésil.

Le cas de Lima Barreto est, quant à lui intéressant, car il présente l’exemple d’une reconnaissance incomplète. Si l’auteur a l’occasion de faire publier son premier roman à Lisbonne en 1905 (grâce au voyage d’amis), il est intéressant de voir que cet auteur, qui n’est pas allé en Europe lui-même, n’a pas la légitimité au seil de l’élite brésilienne des intellectuels et des auteurs qui y ont séjourné, il n’est dès lors qu’imparfaitement reconnu de son vivant et meurt en 1922 dans l’indifférence générale.

Pour bon nombres de membres de l’élites brésiliennes, ce voyage a ainsi valeur de prélude ou d’antichambre à une carrière qui peut être brillante et qui souvent commence dès le retout. Le cas du Baron de Rio Branco est à ce sujet tout à fait édifiant : son premier voyage en Europe a lieu en 1866, entre son bacharel de droit (de l’Université de Recife) et son entrée dans la vie active, avec son premier poste de professeur d’Histoire du Collège Impérial. De la même manière, Joaquim Nabuco fait son premier voyage en Europe en 1871. On peut noter que son retour en 1873 marque, bien qu’il s’en défende, le début de sa carrière politique. Si celui-ci est par ailleurs reconnu dans sa vie politique, c’est, grâce à la reconnaissance qu’il a acquise en Europe. De la même manière, c’est sa connaissance de l’Europe et en particulier de la Grande-Bretagne qui motive le fait qu’il soit choisi pour diriger la mission spéciale diplomatique sur les frontières du Brésil et de la Guyane britannique.

C’est aussi à travers ses multiples voyages en Europe, et spécialement à Paris, que Luis Gastão d’Escragnolle Dória acquiert sa légitimité brésilienne. Cet intellectuel brésilien, descendant d’une famille très influente sous l’Empire, part pour la première fois en Europe. Comme en atteste sa correspondance à la fin des années 1880, il y voyage de multiples fois à la fin du XIXème et au début du XXème siècle, voyages qui coïncident avec la construction d’une importante carrière administrative. Escragnolle devient ainsi rédacteur des débats du Sénat en 1896. En 1910, le gouvernement républicain l’envoie en Europe afin de répertorier les documents relatifs à l’Histoire du Brésil se trouvant dans les archives européennes, tâche à laquelle il s’adonne, avec la compagnie de son épouse, dans diverses villes d’Europe. Il est intéressant de constater, ce qui n’est sans doute pas innocent, que comme l’atteste son diplôme de membre de l’Institut brésilien d’Histoire et de Géographie (IHGB), celui-ci intègre la vénérable institution le 6 mai 1912 ; l’année de son retour en Europe, par ailleurs, on peut aussi penser que cette expérience européenne pourrait avoir fortement pesé dans la balance lorsqu’il est nommé directeur des archives nationales brésiliennes, en 1917.

On peut dire, pour conclure, que le voyage et le séjour en Europe sont transformateurs dans la mesure où ils terminent et couronnent la formation des élites brésiliennes, qu’il s’agisse de leur formation scolaire et universitaire ou de leur formation à la vie. Ces élites sont, à leur retour d’Europe, bien souvent considérées comme formées à part entière. Par ailleurs, celles-ci s’initient, durant ce voyage, à un mode de vie européen qu’elles auront tendance à adopter et à perpétuer tout au long de leur vie et qui est souvent considéré, au Brésil, comme un mode de vie « civilisé ». Par ailleurs, ces voyages concourent à construire au Brésil une opinion européenne ; les Brésiliens revenant d’Europe se sentant assimilés à un espace culturel qui pour eux a tout, à la fois d’un centre idéal et d’une altérité radicale. Ils développent ainsi dès leur retour un jugement, une opinion sur les événements européens et s’impliquent pleinement dans les affaires qui passionnent ou bousculent l’Europe : on observe ainsi qu’un des premiers articles ouvertement dreyfusard, publié le 3 février 1895, trois ans avant le J’accuse d’Emile Zola, paraît à Rio de Janeiro dans O Diario de Noticias, et est signé par Ruy Barbosa, alors à Londres. Ces élites ont d’autant plus de facilité à se faire entendre au Brésil qu’à travers le capital social qu’elles acquièrent en Europ c’est une véritable légitimité brésilienne qu’elles se construisent.

Conclusion : Vers un nouvel idéal étranger

          Pour conclure, on peut constater que, comme c’est largement le cas en Europe, l’élite de la capitale, au Brésil, a valeur d’élite nationale. Il est nécessaire en ce sens, pour un membre de l’élite régionale qui aspirerait à faire partie de l’élite nationale, de passer par la capitale et de s’y former comme d’y bâtir ses réseaux. Cette réalité est par ailleurs clairement présente en France au XIXe siècle, ce qui est largement illustré dans la littérature : de Julien Sorel à Rastignac, de Bel-Ami à Frédéric Moreau. Cependant, dans le cas de la jeunesse et de l’élite brésilienne, cette étape de construction et d’acquisition du statut d’élite nationale se couple d’une validation de ce statut qui ne peut s’effectuer que par le biais du voyage en Europe, et dans ce qui est vu, pour les élites brésiliennes comme le lieu de la civilisation et de ses racines. Il s’agira, ainsi, pour les élites brésliennes en devenir, d’acquérir un double capital social, tout d’abord un capital social national qui leur donnera les moyens de partir pour l’Europe, et dans un second temps, un capital social européen qui leur assurera un statut définitif de membres de l’élite brésilienne à leur retour. Tout ceci ne mène qu’au constat final qu’au XIXe siècle déjà, par le biais de la dialectique de civilisation et de barbarie, très présente en Amérique latine, et à travers la présence idéale de l’Europe, c’est déjà une forme de mondialisation culturelle qui est à l’œuvre dans les milieux d’élites. Si la Première Guerre Mondiale va changer la donne, en créant notamment un éloignement par rapport à l’Europe, comme le constate Olivier Compagnon dans son article « Entrer en guerre ? Neutralité et engagement de l’Amérique latine entre 1914 et 1918 », il est intéressant de constater qu’après les années 1920, si la jeune élite brésilienne continue de se former en Europe, il ne s’agit plus du seul choix possible. L’Europe commence à connaître, comme lieu de formation et de confirmation des jeunes élites brésiliennes, la concurrence des Etats-Unis, Gilberto Freyre termine ainsi sa formation universitaire aux Etats-Unis et il ne sera pas le seul, on a ainsi tout lieu de constater qu’après la première guerre mondiale, l’idéal européen n’est plus le seul idéal possible.

 

Notes de fin

[1] « Social capital is the aggregate of the actual or potential resources which are linked to possession of a durable network of more or less institutionalized relationships of mutual acquaintance and recognition »

[2] Amado Gilberto, Mocidade no Rio e primeira viagem à Europa, Rio de Janeiro, José Olympio, 1956.

[3] Amado Gilberto, op. cit., p. 216.

[4] Bibliothèque Sainte-Geneviève, Fond Ferdinand Denis : MS 3419 / Fol 29-30

[5] FJN (Fondation Joaquim Nabuco – Recife) –  JN CP P2 DOC 27.

[6] Nestor Victor, Paris, impressões de um brasileiro. Livraria Francisco Alves, Rio de Janeiro, 1911.

[7] CRB (Casa de Rui Barbosa) : Fonds Pandia Calogeras.

[8] Nabuco Joaquim, L’option, Hachette, Paris, 1906, p.45.

[9] Lima Barreto, Le Moing Monique et Mazéas Marie -Pierre (trad,) Souvenirs d'un gratte papier (Recordações do Escrivão Isaías Caminha, Rio de Janeiro, 1909) Paris, L'Harmattan, 1989, p. 47.

[10]Victor Nestor, op. cit

[11] Lima Alceu Amoroso, companheiros de viagem, Rio de Janeiro, Livraria José Olympio Editôra, 1971.

 

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Pour citer cet article:

Sauthier Etienne, «Aux sources de la civilisation : Les jeunes élites brésiliennes et le voyage en Europe dans la seconde moitié du XIXème siècle (1850-1914).», RITA, n° 4 : décembre 2010, (en ligne), Mise en ligne le  10 décembre 2010. Disponible en ligne http://www.revue-rita.com/traits-dunion-thema-59/aux-sources-de-la-civilisation.html